Si il y a bien quelque chose que tout le monde doit savoir, c'est que je suis Mauve Tremblay. Et que tôt ou tard, je détruirai tout sur mon passage, comme l'ont fait les tyrans, terroristes et anarchistes. Moi, je ne suis rien de tout ça. Je ne suis même pas influente. Je suis celle qui n'a besoin que d'eau et de cigarette pour vivre. Personne ne m'aime, et je n'aime personne. ça me convient très bien. Parce que je suis un ouragan.

Même ma mère ne m'aimait pas. Et encore moins mon père inexistant. Je n'étais pas voulue, mais ma mère a décidé de me garder tout de même, parce que bon, j'avais beau ressembler à mon père, il fallait bien qu'elle ait de la progéniture, m'voyez ? Mon enfance ne ressemble à rien. Ma génitrice était diagnostiquée instable, un jour elle m'adorait, l'autre elle m'oubliait à l'école. Soit elle riait, soit elle pleurait. Mais ce qui me faisait le plus mal au coeur, c'était ça. « C'est à cause de toi si j'en suis là ! » J'étais coupable de sa misère, je l'ai cru. Longtemps. Trop longtemps. Et pour continuer dans la lignée, pour tout vous dire, je n'avais pas d'ami, que des ennemis. Que serait la vie sans ennemis ? Et elle a continué comme ça, l'adolescence. Quatorze ans et déjà fumeuse. J'entendais partout où j'allais des injures à mon égard, « Trainée » Et je ne rétorquai pas, il ne le méritait pas. Personne ne me méritait, parce que j'étais Mauve Tremblay. A force d'être insultée, injuriée et frappée, j'en avais fait ma force. Et j'étais devenue aussi violente et méprisante qu'eux. Seize ans, et touche à tout. Réputée pour n'avoir aucune pitié et assez de force dans les bras pour frapper le premier venu malgré ma maigreur, ma vie prenait un tournant différent. Je prenais les rênes de mon petit empire, qui s'écroula aussi vite qu'il ne s'était construit. Rébellion. Les années lycées, ils les ont passé à me craindre. Mauve, mélange de douceur et de virilité. Qui l'eut cru ? Je suis sorti avec nombres de gens ; filles, garçons, transsexuels, ou coups d'un soir, je ne les aimait pas. Sous un visage angélique se cachait une haine incomparable et un blizzard. Dix huit ans et un mort. Ma mère, qui tombe des escaliers brutalement. Qui se souciait encore de sa pauvre mère, qui en retour, ne recevait que de la peine dans ses yeux ? Et bien moi, Mauve. J'étais encore assez naïve pour avoir de la pitié pour celle qui me détestait, qui ne comprenait pas pourquoi elle m'avait abandonné. A son dernier souffle, lorsque je m’apprêtais à pleurer, il n'y a qu'une chose qui sortit de ses lèvres bleuies. Une seule, dont je me souviendrais toute ma vie. « Va t-en » Et puis plus rien. Les larmes n'ont pas coulés, c'est la haine et la colère qui l'ont emporté. Ils m'ont emporté avec.

Ils ont fait de moi quelqu'un de détestable. Et je suis partie loin de Londres, pour aller à Siloam Springs, chercher refuge là ou aucun souvenir n'irait me hanter. Pour détruire comme ils m'ont détruit.