perchée sur des talons gucci, contrefaçon pourtant presque authentique, je m'avance vers le miroir de chez daenerys, me penchant pour appliquer une énième couche de rouge à lèvres, rouge flamboyant. ma robe brille sous la lumière de la salle de bain. du cuir, du noir, de la couture. ça pue l'alcool, ça pue la fête. mon attitude de pétasse insensible me ravit. car je sais que ce soir, j'en ai besoin. la boisson, j'en aurais besoin aussi. pour oublier un peu ma vie. manque de fric, mecs, tout. mais surtout, c'est la mort de swann qui me pèse, comme un poids sur le cœur. la voir agonisante, sur son parquet. simple tâche blanche sur un sol froid.
j'ai cru voir ma mort. voir mon corps endolori sur le sol, sans vie. à ce moment, mon cœur s'est arrêté. littéralement. mon souffle s'est coupé, et j'en ai hurlé tout ce que je savais. le désespoir, la solitude avait pris forme dans ma gorge pour en sortir, m'écorchant chaque fois plus. j'ai dégueulé mon petit-déjeuner, mon midi et ma bouteille de vodka. les voisins sont montés, et je ne l'ai plus revu. swann était morte. mais ça, personne ne le sait.
je ferme les yeux et les rouvre sur mon reflet parfait. et non pas sur celui de ma jumelle. j'esquisse un semblant de sourire, effaçant l'image de mon esprit avant de sortir de la pièce immense et de rejoindre mon amie. « hey chérie, t'es prête ? » puis j'ajoute avec un sourire gourmand. « parce que moi, j'ai tout. aussi bien la classe que la drogue. » je lui lance un coup d'oeil et nous ne tardons pas à filer de son appartement, direction la tournée des bars.

deux heures. deux heures qu'on est sorties. on a bu, sniffé, fumé. on a dansé, ri, on a tout fait dans l'excès. après tout, c'est pas comme ça qu'on vit ? assise sur le muret, bouteille de vodka à la main et joint d'un l'autre, je regarde bêtement les étoiles.
et je songe à zac. à swann. à un peu tout. mais à la place, mon cerveau bifurque sur daenerys. je lui tends mon joint, avant de lui lancer. « abuse pas des bonnes choses, mon chou. »

mon maquillage arrive à effacer toutes imperfections. il arrive même à effacer la tristesse et le trouble qui émane de mes yeux bleus, le remplaçant par une superbe couche de noir, qui me donne des airs de princesse revêche. parfois, je me remercie d'être une femme.  « je vois ça … tu as l’intention de tuer tous les mecs de la planète ? parce que là ils vont tous faire une crise cardiaque en voyant une bombe pareille ! » je peux pas m'empêcher de rire. elle est déjà bourrée. puis, retrouvant son peps, elle se relève et m'attrape pour me traîner jusqu'à la porte, en décrétant. « toujours prête à faire la fête ! » moi aussi.
surtout ce soir.

sur notre muret, on entends la musique au loin. j'imagine quelques adolescentes qui pouffent, d'autres plus vieilles, noient leurs amours perdus. nous, on s'amuse. rien que le sourire con de ma meilleure amie -ou plus communément appelée, ma chérie ou princesse pétasse prouve combien la nuit a été excellente.
mais ce n'est pas terminée. minuit a peut-être sonnée, il nous reste encore à fêter jusqu'à l'aube, et peut-être même continuer toute la journée. je ne dirais pas non si ça m'aidait à oublier tout ce que j'ai rangé, ce soir, dans une boîte de mon crâne. mais petit à petit, ça revient. ça me trouble. je file le joint à daenerys, essayant de faire de l'humour. ce par quoi elle me réponds, avec l'air d'une petite fille sage -et je songe qu'elle sait très bien faire la comédie, elle, « oui maman ! » je lui file un coup de poing amical sur l'épaule, avant d'y poser ma tête, en soupirant. « à ton avis, combien de mec m'ont matés ? » j'esquisse un sourire avide, avant de lui piquer le joint et d'inspirer profondément. ce soir, j'ai pas dragué. pas embrassé. parce qu'il y a zac. mais ça, dae, elle le sait pas. faudrait peut-être lui dire. « fin on s'en tape. j'ai quelqu'un. » j'annonce de but en blanc la couleur.
couleur de l'amour.