Et les étoiles ne brilleront plus jamais, cette terre si ronde est devenue carrée
Acte 4 : Sombres découvertesParfois, Nathan a l’impression d’avoir des flashs. De drôles de souvenirs qui ne semblent pourtant pas lui appartenir. Il se revoit dans un grand jardin qu’il ne lui semble pas avoir connu, ou alors dans une aire de jeu inconnue jouant avec son ballon avant que sa mère ne vienne lui prendre la main. Parfois il revoit d’autres visages dont les voix ont des tonalités et des inflexions qui lui paraissent familières, des personnes qui semblent l’aimer mais dont les contours sont toujours indécis, comme floutés sur une photo mal ajustée. Parfois, il entend encore des notes de piano qui virevoltent dans sa tête et il se met à fredonner une mélodie qu’il n’entend pourtant que rarement et qu’il n’a eu le loisir de retrouver que vers ses 12 ans quand il a eu accès à l’ordinateur. Ce qu’il ignore, c’est que ces souvenirs sont ceux d’avant son enlèvement, qu’ils correspondent à la vie qu’il menait avec ses parents biologiques et qui ne s’effacent pas tout à fait. Plus il grandit plus il s’y fait, se disant que son cerveau a dû mélanger quelques éléments. Et puis parfois il en rêve, ce qui le réveille parfois en sursaut et en sueur.
Lorsqu’il eut 14 ans, sa professeure d’anglais demanda à ses élèves de faire des recherches sur des enfants enlevés afin de les sensibiliser. Pour ne pas qu’ils s’éparpillent, l’enseignante leur avait donné une liste de sites à consulter et l’un d’eux fournissait des reconstitutions faciales de ce à quoi les enfants ressembleraient aujourd’hui. Nathan en regarda beaucoup, ça l’intéressait vraiment, lorsque soudain l’une d’entre elle attira vraiment son attention. La reconstitution montrait une jeune fille à l’air innocent, rousse, aux grands yeux verts au visage rond. La représentation était bizarre, comme toutes celles visionnées avant, cependant celle-ci avait quelque chose de familier. Elle ressemblait étrangement à sa sœur. Etonné, il imprima l’image et courra dans la maison à la recherche de quelqu’un et tomba sur son père. Il lui montra la photo fièrement en lui expliquant ses recherches et lui demandant si c’était normal que la ressemblance avec sa sœur soit si flagrante, se prenant un peu pour un détective. Il ne le remarqua pas de suite mais son père vira au rouge avant de lui arracher la photo des mains.
« Qu’est-ce que tu insinues ? Que nous avons enlevé ta sœur ? Qu’elle est portée disparue ? » Nathan perdit toute son assurance et fit beaucoup moins le fier.
« N… Non … Pas du t… tout ! Je trouvais juste ça bizarre » Il n’eut pas le temps de la voir venir, mais en revanche il la sentit bien, cette gifle qui laissa une grande marque rouge sur sa joue et une brûlure douloureuse.
« Je t’interdis de penser de telles choses ou d’en parler à qui que ce soit ! Ce ne sont que des conneries ! Tu m’entends ? Ce n’est pas ta sœur là ! Compris ? » Nathan hocha la tête en tenant sa joue d’une main, essayant de retenir ses larmes.
« Maintenant file dans ta chambre ! » Il ne se fit pas prier et fila aussi vite que possible, tentant d’oublier cette mésaventure et cet horrible souvenir qu’il enfouit au fond de son cerveau. Pourtant une petite part de lui savait déjà que quelque chose clochait mais il n’y repensa plus, se consacrant à ses études et sa routine quotidienne. Cet orage avec son père se dissipa d’ailleurs très rapidement car ils firent comme si de rien n’était le soir même. En tout cas, il n’en parla jamais à ses sœurs, bien trop humilié et effrayé par la réaction de leur paternel.
Avec l’université, Nathan restait en semaine sur le campus, partageant sa chambre avec son meilleur ami et profitant des activités sur place et rentrait le weekend afin de se ressourcer en famille avec ses deux sœurs. C’était un rythme qui lui convenait plutôt bien, tant qu’il avait ses ordinateurs avec lui et qu’il pouvait travailler. Car il adorait ce qu’il faisait même si cela peut paraître bizarre d’aimer passer ses journées sur un ordinateur à trafiquer des codes et autres. Le weekend des 18 ans de ses sœurs ne fut cependant pas aussi tranquille qu’habituellement. Comme il était de coutume, les deux filles étaient parties faire leur activité rocambolesque qu’elles s’octroyaient toujours le même jour de chaque année. D’après ce qu’il avait compris aujourd’hui c’était une prise de sang. Grand bien leur fasse. Nathan était rentré dans la matinée, les manquant de peu, ses sœurs comme ses parents qui étaient partis faire des courses. Nathan alla donc dans sa chambre travailler. Il ne pût rater l’arrivée de ses sœurs alors qu’Erilys l’appelait de sa voix forte et chantante. Cependant il était sur un jeu compliqué qui requérait une grande concentration s’il ne voulait pas manquer un élément. Il aurait le temps de leur souhaiter un joyeux anniversaire et de les prendre dans ses bras après. Elles pouvaient bien attendre quelques minutes. Cependant, ce n’était visiblement pas de l’avis d’Erilys qui entra dans sa chambre sans qu’il l’entendît et qui passa une main devant son visage pour attirer son attention. Etonné, Nathan eut un mouvement de recul avant de fixer sa plus jeune sœur. Il n’eut pas le temps de lui faire remarquer que quand sa porte était fermée, cela voulait dire défense d’entrée qu’elle commença déjà à déblatérer sur leur matinée anormale. Nathan fronçait les sourcils de plus en plus au fur et à mesure qu’elle parlait, glissant de temps en temps un regard vers Eliana qui patientait les bras croisés mais qui semblait attendre quelque chose. Il reportait donc son attention sur Erilys qui lui expliquait son problème de groupe sanguin.
« C’est fou non ? Tu crois que c’est possible ? T’en penses quoi, toi ? » lui demanda-t-elle finalement. Il comprenait leur inquiétude, ce qui lui accentuer le froncement de ses sourcils tandis qu’il réfléchissait, se remémorant ses cours de biologie. Après tout c’était lui le scientifique de la famille, non ? Mais avant tout, il devait rassurer ses sœurs, cela ne pouvait pas être si grave que ça, elles ne devaient pas se faire un tel sang d’encre.
« Ce qui m’étonne, c’est que papa et maman nous ont toujours maintenu que nous étions O ... » Il réfléchissait, tentant de se remémorer s’il avait déjà fait un test sanguin lui-même mais la réponse était non. Il avait toujours cru ses parents à ce sujet. Voyant que ses sœurs étaient suspendues à ses lèvres, il fit l’ébauche d’un sourire pour les rassurer.
« Mais ça ne doit pas être bien grave, ils ont dû se tromper. Ce qui compte c’est que vous soyez du même groupe sanguin non ? » Mais effectivement quelque chose clochait, quelque chose dans le cerveau de Nathan lui disait que ça n’allait pas et essayait de le secouer. Il se dit cependant qu’il devrait remettre ça pour plus tard.
« Mais au fait … Joyeux Anniversaire mes deux sœurs préférées ! » Il se pencha pour prendre Erilys dans un bras et tendit l’autre pour accueillir Eliana.
« 18 ans putain ! Ca vous dit que je vous paie ma tournée de bière ? Vous aurez même le droit à votre cadeau. Bien sûr les parents ne le sauront pas ! » Il leur adressa un clin d’œil, prêt à se consacrer à la journée spéciale de ses sœurs.
Cependant, le soir même quelque chose le titilla encore au sujet de ce fichu groupe sanguin. Ce n’était vraiment pas normal. Pris d’une soudaine insomnie, il se releva, alluma son ordinateur et entama quelques recherches. Il passa la nuit à se retourner les choses dans la tête puis pris une décision. Dès lundi, il irait lui aussi faire un test sanguin pour en avoir le cœur net. Le rendez-vous prit un peu plus de temps, il lui fallut attendre la fin de la semaine et le résultat l’inquiéta. Il était B-. Pourquoi est-ce que leurs parents leurs auraient menti à ce propos ? A peine eût-il ces résultats qu’il en parla à Adam, parce qu’à deux on réfléchit toujours mieux, surtout sur un jeu vidéo. Adam trouva cela bizarre aussi mais heureusement ils avaient prévus de passer du temps ensemble pour fêter la fin de l’année. Tout le samedi ils en reparlèrent, essayant de comprendre pourquoi les parents de Nathan auraient menti pour un groupe sanguin. Ils étaient peut être à l’ouest ? Ils ont mal compris et ont reporté les mauvais éléments sur leurs carnets de santé ? Nathan souleva cependant que ses parents étaient tous les deux O, par conséquent les enfants d’un couple d’O devaient être O aussi non ?
« A moins qu’ils soient adoptés » fit remarquer Adam. Nathan essaya d’en rire mais n’y parvint pas réellement. Ils n’avaient jamais mentionné cela, si ? Se creusant la tête, il se remémora alors quelque chose qu’il avait mis de côté pendant de longues années. Pourtant il ne pouvait pas oublier l’engueulade qu’il s’était prise !
« Adam … Tu te souviens en 4ème quand notre prof d’anglais nous avait demandé de faire des recherches sur les enfants disparus, j’étais tombé sur une photo qui ressemblait étonnamment à Erilys, ou du moins a ce que l’enfant disparu ressemblerait. Tu sais c’était des reconstitutions, ça m’avait trop étonné et je l’avais montré à mon père. Je m’étais pris une de ces engueulades … » Adam le regarda d’un drôle d’air avant de lâcher
« Si ça se trouve, vous êtes des enfants kidnappés ! » et de rire. Seulement, ça non plus ça ne fit pas rire Nathan. Il en devint même livide. Et si c’était vrai ? Il s’empressa d’effectuer des recherches, dans le but de retrouver cette fameuse photo. Il lui fallut un certain temps et finalement il y parvint et Adam n’en revenait pas.
« C’est vrai que ça ressemble à ta petite sœur quand elle était jeune. » Nathan hocha la tête d’un air grave.
« Tu crois que… Tu crois vraiment qu’on aurait été enlevé ? » « Mec, c’est peut-être qu’une coïncidence ! Tu sais qu’il y a plein de gens qui se ressemblent ! Et puis c’est qu’une reconstitution, ça peut ressembler à beaucoup d’enfant ! » Il marqua une pause avant de continuer
« Mais c’est vrai que ça fait beaucoup de coïncidence. Le groupe sanguin, ça… » « Et ces rêves que je fais… Ces souvenirs… Avec cette impression d’avoir vécu une autre vie étant plus jeune… » « Quoi ? » Et il lui raconta les quelques brides qu’il avait, la musique, les visages flous, et au fur et à mesure qu’il parlait, Adam devenait aussi livide que lui.
« Mec, y a franchement des recherches qui s’imposent là ! Y a un truc pas net dans cette affaire ! » Nathan était d’accord avec lui mais la première chose qu’il devait faire était d’en avertir ses sœurs. Il leur envoya donc un texto.
« On doit parler au plus vite de quelque chose d’important. Demain 15h au parc. Sans que les parents le sachent. Soyez discrète» Qu’est-ce que cela pouvait faire qu’ils en savent quelque chose ou non au final ? Cependant, cela paraissait important à ce moment-là.
22 juillet 2013 - Il arriva un peu en avance au point de rendez-vous et quand ses sœurs arrivèrent, il les emmena précipitamment à l’écart sur un banc avant de se jeter à l’eau et de leur faire part de tous ses doutes.
« J’ai beaucoup réfléchis à ce que vous m’avez dit sur les tests sanguins. Je ne voulais pas vous inquiéter la semaine dernière alors que c’était votre anniversaire, du coup j’ai minimisé les choses et y ai réfléchi de mon côté. J’ai aussi fait un test sanguin et il s’avère que je suis B-… Mais ce n’est pas tout … » Il leur reporta tout ce qu’il avait dit avec Adam, toutes ces suspicions, commençant d’abord sur la théorie de l’adoption, avant de parler de sa mésaventure de 4ème, sortant la photo pour la montrer à ses sœurs et enfant de ses rêves flous, de la mélodie. Puis il attendit leur réaction, persuadé qu’elles le prendraient pour un fou. Ce fut Eliana qui craqua la première, ce qui n’étonna même pas Nathan.
« Tu as fumé quelque chose, non ? » il ne releva pas, comprenant l’état dans lequel elle devait se trouver. Ce genre de nouvelles n’étaient jamais guères agréables.
« Nan, parce que je t’explique là ! Ce que tu es en train de nous dire c’est qu’on a été enlevé ?! » Sa voix commença à dérailler vers les aigus, ce qui fit mal à Nathan. Toute cette histoire de toute façon c’était trop. Il ne savait pas ce qu’il vallait mieux. Qu’elles n’aient jamais fait le test ? Qu’ils ignorent toujours tout de cette affaire ?
« Non mais tu t’imagines qu’on va gober ça ? C’est impossible ! C’est Juste IM-PO-SSI-BLE ! » Il aurait voulu répondre, la rassurer, la calmer mais Erilys s’interposa.
« La photo… Je veux la revoir. » Nathan la lui tendit avec hésitation, de peur que ce ne soit qu’un gros choc pour elle
« Il y a peut-être une autre explication… On va chercher… Et on ne dit rien aux parents. S’il vous plait. » Il était d’accord avec elle, ils devaient faire des recherches pour en savoir plus sans éveiller les soupçons de leurs parents. Et selon lui le plus dur dans l’affaire serait de ne pas modifier son comportement avec ses parents alors qu’il ne sait plus trop comment se comporter avec eux.
« Oui… Cherchons… »Février 2014 – Leurs recherches avaient été pour le moins infructueuses jusque-là et pourtant, plus ils y repensaient et plus ils en discutaient entre eux et plus la piste de l’enlèvement leur semblait probable, bien que cela fut dur à admettre. Malheureusement, aucune preuve n’était venue corroborer leur déduction et ils avaient du mal à jouer les enquêteurs malgré leur volonté. Leurs parents étaient souvent dans la maison et ils devaient rester discrets, de plus, tous les trois avaient également leur vie à mener et même si rien n’était pareil depuis la conversation qu’ils avaient eu, ils continuaient à assumer leur quotidien du mieux qu’ils le pouvaient tout en sautant sur la moindre occasion de poursuivre leurs investigations. Cela aurait été plus simple s’il n’y avait pas cet espèce de froid entre Eliana et Nathan. Mais heureusement Lys parvenait à mettre du baume au cœur de son grand frère. Ils ne trouvaient pas grand-chose et Nathan attendait le moment parfait pour pouvoir étudier l’ordinateur de leurs parents et fouiller de fond en comble leur chambre. Ils parvinrent à plusieurs reprises à faire cette dernière option mais ils n’y trouvaient rien. Cependant Nathan restait persuadé qu’il devait y avoir quelque chose. Tout cela ne pouvait être une simple coïncidence. Cependant, un jour qu’il était sur le campus, travaillant, son portable se mit à vibrer. Il s’empressa de prendre connaissance du contenu du message et bondit rapidement de sa chaise. C’était Erilys. Elle avait trouvé quelque chose et il était persuadé que cela avait un lien avec les parents. Il attrapa sa veste en vitesse et sorti en courant du bâtiment pour rejoindre sa voiture et conduisit le plus rapidement possible jusqu’à chez lui. Il ouvrit la porte à la volée regardant furtivement partout autour de lui.
« Lys ? » Il monta les escaliers, trouvant sa sœur dans sa chambre et regarda autour de lui avec inquiétude
« Qu’est-ce que tu as trouvé ? Les parents ne sont pas là ? Où est Eliana ? » Si seulement c’était les seules questions qu’il avait en tête…
« Maman est chez une amie, papa bosse. » Nathan hocha la tête mais cela n’apaisait pas totalement.
« Elle ne m’a pas répondu, elle ne devrait pas tarder. On va l’attendre, c’est important. » Il hocha de nouveau la tête, espérant que l’attente ne soit pas trop longue. Il s’adossa alors contre le mur et attendit.
Elle mit du temps à arriver et Nathan faillit perdre patience, surtout avec toute la pression qui s’accumulait au fur et à mesure des révélations. Elle finit enfin par arriver, s’excusant de son retard et les informant qu’elle avait aussi trouvé quelque chose, ce qui intrigua Nathan un petit peu plus. C’est Erilys qui commença.
« Des affaires de bébés. » Nathan haussa un sourcil. Commencer par le début a toujours du bon.
« J’ai trouvé une cachette qu’on avait pas repéré sous la commode de papa et maman… Il y a une sorte de boite à chaussures avant des chaussons et d’autres trucs comme ça… J’ai tout remis à sa place, sauf ça… » Elle sortit quelque chose d’une petite boîte, quelque chose qui ressemblait à un bracelet pour enfant qu’elle tendit à sa jumelle
« Regarde le prénom. » Pour le coup Nathan fronca les sourcils, observant Eliana et attendant de savoir ce qu’étaient ces prénoms. Il remarqua d’ailleurs que la plus âgée des jumelles évitait son regard, ce qui le fit se renfrogner.
« Eléa Maë ? » lut Eliana. A son plus grand soulagement, cela n’éveilla rien en Nathan. Ce n’était que des prénoms. Mais la question était : à qui appartenaient-ils ?
« Tu penses que c’est à une de nous deux ? » La même pensée venait de traverser le cerveau de Nathan. C’était soit à l’une des deux, soit à un autre enfant … Qu’ils auraient perdus ?
« Tu penses que… » Elle ne termina pas sa phrase cependant Nathan n’eut aucun mal à deviner ce qu’elle voulait dire.
‘Tu penses que c’est le vrai prénom de l’une de nous deux ?’. En réponse à sa question incomplète, Lys hocha la tête en silence.
« Il y avait notre date d’anniversaire sur la boite. » Au moins une chose dont on était sûr. Leur date d’anniversaire. Bien qu’un peu assommé par cette nouvelle révélation, Nathan était avide d’en savoir plus.
« Et toi Eliana, qu’as-tu trouvé ? » lui demanda-t-il doucement comme s’il voulait éviter de l’effrayer..
« Alors, ce que j’ai trouvé c’est… Comment dire ? Compliqué. » Nathan fronça un peu plus les sourcils. De toute façon toute cette histoire était compliquée. Comme si leur montrer était plus simple elle sorti un cahier, le feuilleta quelques secondes avant de le placer devant son frère et sa sœur
« Voilà, il y a un bon moment déjà, j’ai lu un bouquin de la bibliothèque à maman. Je ne pense pas qu’elle s’attendait à ce que je prenne celui-ci en particulier – surtout si… Nos soupçons se trouvent avérés – toujours est-il que je l’ai pris lui. » Elle replaça une mèche derrière son oreille et continua :
« Son titre c’est Ellana. Alors ça va paraitre étrange, mais c’est une trilogie qui comprend d’autres trilogies qui s’emboitent, bref c’est compliqué. Pour faire court, dedans, il y a nos prénoms. » Eliana marqua une pause, rassembla ses idées et reprit :
« Enfin, pas exactement. Ce sont nos prénoms mais avec un changement. Par exemple Ellana, mettons-y un i et on obtient Eliana. Il y a Erylis également, mais le y et le i sont inversés, ainsi que Natan, mais sans h. Il y a même certains de nos seconds prénoms : Edwin, Naïs… Je ne pense pas que ça soit une simple coïncidence. » Effectivement, à ce stade-là Nathan ne croyait plus trop aux coïncidences. Il savait qu’il devait parler, dire quelque chose, réconforter ses sœurs mais il en était incapable. Il se sentait juste vide.
« On doit chercher plus loin… L’ordinateur, tu pourrais regarder Nathan ? Il faut envoyer papa et maman loin d’ici pour gagner du temps, ça ne sera pas facile mais c’est envisageable. Il faut qu’on sache. » Nathan se passa une main sur le visage, comme las de toute cette histoire. Mais en effet, il devait accéder à l’ordinateur de ses parents. Il était persuadé que c’était une mine d’or et il savait que depuis sa petite intrusion quand il avait 16 ans, ses parents l’avait véritablement bien protégé, comme s’ils avaient quelque chose à cacher. Mais à tout bien y réfléchir, ils doivent vraiment avoir quelque chose à cacher.
« Oui, je dois regarder sur l’ordinateur. Je devrais réussir à craquer leurs mots de passes, ce n’est pas un souci malgré toutes les protections qu’ils ont essayé d’y mettre. Mais comme tu le dis il faut les envoyer loin pour avoir le temps et faire ça bien. » En pleine réflexion il se mit à arpenter la pièce.
« C’est l’anniversaire de maman » ce mot lui écorcha la bouche
« dans un peu moins d’un mois. Et si on cotisait pour leur offrir tous les deux un séjour à Hollywood, ou plus loin dans un spa où on est sûr qu’ils y resteront longtemps sans se presser. Ils ne devraient douter de rien et on sait comment maman aime les papouilles. Et ça nous laissera tout le temps dont on aura besoin pour nos investigations. On aura même le temps de fouiller la bibliothèque de fond en comble juste au cas où. Qu’en pensez-vous ? » Il attendait l’aval de ses sœurs, pas certain qu’elles seraient d’accord pour donner de l’argent à ses personnes qui semblent leur cacher autant de choses. Cependant à sa grande surprise elles acceptèrent sans ronchonner et ils purent mettre au point leur stratégie.
Et c’est ce qu’ils firent. Quelques semaines après cette entrevue, ils offrirent le dit cadeau à leur mère qui fut ravie, tout comme son mari. Ainsi, le weekend du 15 mars, les trois adolescents eurent la voie libre alors que leurs parents étaient partis. A peine eurent-ils finis de leur faire des signes d’au revoir sur le porche et que la voiture disparu au virage, que les trois acolytes s’empressèrent de retourner dans la maison. Nathan ne se fit pas prier et fonça sur l’ordinateur de ses parents dont il alluma la tour centrale. Il savait l’ordinateur protégé de nombreux procédé tiré de la police. Il savait que son père avait fait appel à un de leur ingénieur informatique pour dresser autant de barrières, tant internes qu’externes sur le pc. Plus il y repensait, plus il était persuadé que ses parents avaient vraiment des trucs à cacher et qu’ils ne voulaient pas que l’on puisse atteindre leur ordinateur. Par exemple lorsqu’il eut 16 ans et qu’il commençait à être fier de ses exploits informatiques, Nathan avait tenté d’accéder à l’adresse mail de sa mère depuis son ordinateur afin de regarder ses mails. Cependant il ignorait à cette époque qu’ils avaient installé un traceur qui indiquait à l’utilisateur de l’adresse lorsqu’une nouvelle adresse IP venait de se connecter sur son compte, et il ne leur avait pas fallu longtemps pour comprendre qu’il s’agissait de leur fils. C’est pourquoi il n’avait pas retenté, il devait se connecter via leur ordinateur pour ne pas être démasqué.
Un premier mot de passe pour accéder au compte de son père lui barra la route, mais grâce à une technique apprise en cours, il parvint à la détourner, forçant l’ordinateur à ouvrir ses portes. La première chose qu’il fit en se retrouvant sur la page d’accueil, où une image d’eux 5 souriants le fixait, fut de regarder scrupuleusement tous les documents, cherchant quelque chose qui pourrait leur être utile, mais en dehors des factures ou de photos de familles numérisées, il n’y avait rien. Il regarda alors l’historique des recherches pour voir s’il y avait quelque chose d’anormal mais là non plus rien. Un mappy, une recherche météo, l’adresse mail, google, youtube… Ce genre de trucs en somme. Prêt à en découvre avec l’adresse mail, il se craqua les doigts.
« Tu trouves » demanda Erilys qui était allongée sur le lit de ses parents, attendant que son grand frère fasse des miracles. Il ricana comme si elle venait de dire une bêtise avant de faire apparaître une série de codes sur l’écran qui lui permirent de contourner le mot de passe facilement de l’adresse mail sans qu’aucune alerte ne s’enclenche, comme s’il avait simplement tapé le mot de passe correct. Au vu de la quantité de mail que contenait la boite mail, n’importe qui aurait pu se sentir submerger. Mais pas Nathan qui procédait pas étape avec une logique sans faille, comme s’il résolvait un rubis cube. Il commença par les tous premiers mails, songeant que s’il devait y avoir un élément révélateur, ce devait être par là. Au début il ne trouva rien. Que des échanges de mails de routine avec son mari. D’une oreille il entendit Lys s’enquérir de s’il trouvait quelque chose, mais comme elle demandait cela toutes les 3 secondes, il n’y fit plus attention. Cependant après plusieurs minutes, un message datant de fin octobre 2003 envoyé par Julian dont l’objet était « Alerte rouge » Nathan plissa les yeux tandis qu’il décryptait les échanges.
From :
Julian.carter@wanadoo.comTo :
Jessica.carter@hotmail.comObject : Alerte Rouge
30/10/2003 at 15:47
Ma chérie,
On vient de nous annoncer qu’une alerte a été lancée. La police serait sur les traces de kidnappeurs qui résideraient dans le Montana depuis plusieurs années. La police sera très impliquée dans l’affaire dès qu’ils auront plus de nouvelles. Je reste aux aguets et à l’affut de la moindre nouvelle. Cependant, comme nous en avons convenu, applique l’alerte rouge. Prépare nos affaires au cas où, qu’on soit prêt à lever le camp. Fait les démarches nécessaires. Si c’est ce que je crois, nous n’avons plus beaucoup de temps. Et fait attention aux enfants.
Avec tout mon amour, Julian
From :
Jessica.carter@hotmail.com To :
Julian.carter@wanadoo.comObject : Alerte Rouge
30/10/2003 at 16:04
Mon amour,
Ce n’est pas possible… Comment auraient-ils fait? Après toutes ces années… J’espère sincèrement que tu te trompes, mais n’aies crainte, j’applique le code comme convenu. En espérant que nous ayons encore du temps …
A ce soir, Jessica
From :
Julian.carter@wanadoo.comTo :
Jessica.carter@hotmail.comObject : Alerte Rouge
01/11/2003 at 11 : 22
Ma chérie,
Ils viennent de nous annoncer que les individus recherchés seraient deux, dans l’état du Montana, avec des enfants de bas âge. Ils ne savent pas encore combien et ne connaissent pas l’identité ni des enfants, ni des adultes. Mais selon les informations, ils seraient dans les alentours de Lewiston. Je crois bien qu’ils nous ont retrouvés. Je ne sais pas ce qu’on a fait de travers mais ils auraient retrouvé des traces du véhicule. Ne t’inquiètes pas, je vais faire le nécessaire à ce sujet, mais nous devons partir au plus vite. Vraiment. Tu as appelé la banque et l’assurance ? Je vais informer mon supérieur comme nous en avions déjà parlé. Mais mon amour, il ne faut vraiment pas qu’on traine.
Je t’aime, on y arrivera. Julian
From :
Jessica.carter@hotmail.com To :
Julian.carter@wanadoo.comObject : Alerte Rouge
01/11/2003 at 11:25
Mon chéri,
C’est noté, fait attention à toi surtout! Les coups de fils sont passés ne t’inquiètes pas. On en reparle ce soir.
Je t’aime. Jessica
Interloqué, Nathan relis ces messages plusieurs fois avant d’appeler les filles.
« Vous vous souvenez de quand on a déménagé du Montana ? » Il les laisse y repenser avant de leur montrer les mails.
« Regardez ce que je viens de trouver. Je crois que c’était peu de temps avant qu’on parte. Vous vous souvenez comment ils nous ont réveillé en pleine nuit ? Le plus étrange c’est qu’ils agissaient comme des coupables au vu de cet échange. Je peux peut être me tromper mais cela semble bien flagrant … Vous croyez qu’on est parti non pas à cause d’une mutation de papa mais parce qu’ils ont failli être retrouvé ? » Il voit que cette annonce raisonne comme une bombe. Mais Nathan sait ce que cela fait. Il a l’impression qu’un poids vient de lui tomber dans le ventre. Il demande à l’une des sœurs de recopier scrupuleusement l’échange, refusant de se le transmettre ou de l’imprimer car il sait que cela laisserait des traces facilement traçables, puis persuadé qu’il peut trouver autre chose, il continue ses recherches. Il doit s’écouler une dizaine de minutes avant qu’il ne trouve un autre mail intéressant intitulé
« Problème avec Nathan »From :
Julian.carter@wanadoo.comTo :
Jessica.carter@hotmail.comObject : Problème avec Nathan
12/03/2009 at 16:47
Mon cœur,
J’espère que tu profites bien de ton petit voyage chez ton amie. Ne t’inquiètes pas, j’ai les choses en main. Mais je tenais à t’avertir que la professeur d’anglais de Nathan a demandé à ses élèves de faire des recherches sur les enlèvements d’enfants apparemment pour un travail de sensibilisation. Je ne l’ai appris que lorsqu’il s’est pointé avec une photo vraiment très semblable à Erilys. Il m’a dit que c’était une reconstitution faciale. Tu te rends compte de ce que ça veut dire ?
1) Nathan pourrait comprendre d’où il vient et d’où vienne ces sœurs
2) Ils recherchent Erilys …
Il faudra faire attention. Je garde cette affaire à l’œil. Mais je ne pense pas que Nathan en parlera. En tout cas je me suis arrangé pour.
Je t’aime, Julian.
From :
Jessica.carter@hotmail.com To :
Julian.carter@wanadoo.comObject : Problème avec Nathan
12/03/2009 at 18:44
My love,
C’est quoi ce bordel ???? Depuis quand on donne ce genre de devoir à des gamins? Qu’ils aient 14 ans ou pas je m’en fous !!! Et si quelqu’un reconnaissait Erilys ? Et si quelqu’un faisait le rapprochement ? On serait foutu et les gamins aussi… Mon amour, on peut pas tout perdre… J’aimerais te dire d’aller engueuler la prof mais ça attirerait trop l’attention… Il n’y a plus qu’à espérer. Essaie tout de même de voir où est-ce que Nathan a pu trouver cette photo pour voir s’il y en a d’autres. Au pire emmène Erilys chez le coiffeur si la ressemblance est trop flagrante.
Fais attention à toi, fais attention à eux. Je vous aime. Je vais essayer de rentrer plus tôt, cela m’inquiète. Jessica.
From :
Julian.carter@wanadoo.comTo :
Jessica.carter@hotmail.comObject : Problème avec Nathan
12/03/2009 at 19:02
Ma chérie,
Ne t’inquiètes pas, profite plutôt. Je suis sûr que c’est moins grave que cela n’en paraît et personne ne fera le rapprochement. Si cela peut te rassurer je vais emmener les filles chez le coiffeur et m’assurerait qu’Erilys se retrouve avec les cheveux courts. Et je vais mener mes petites recherches sur le site. Cependant je refuse de m’intéresser à la famille. Ca fait tellement longtemps, elle devrait s’être fait à l’idée.
Je t’aime, tu me manques. Julian.
From :
Jessica.carter@hotmail.com To :
Julian.carter@wanadoo.comObject : Problème avec Nathan
12/03/2009 at 20:07
Mon Coeur,
Je suis d’accord avec toi. J’espère que tu as demandé à Seb d’installer ce qu’il fallait pour ne pas que l’ordi soit pisté.
Bisous aux enfants, ne faites pas trop les fous ce soir et ne les couche pas trop tard. Je vous aime. Jessica.
En lisant cela, Nathan se demande si leurs parents ne sont pas plusieurs dans leurs têtes car tout n’est pas toujours cohérent. Cependant il se souvient parfaitement bien de ce jour où il a montré l’image à son père et de sa réaction plutôt … Violente.
« Tu as trouvé autre chose ? » me demande Erilys.
« Vous vous souvenez de ce que je vous ai dit à propos de l’image de la reconstitution faciale de Lys ? Ca ne leur a vraiment pas plu … » Et il les laissa lire les quelques messages par-dessus son épaule. Bien que ces nouvelles ne plaisaient à personnes, il devait tout de même continuer ses recherches afin de trouver le plus de preuves possibles. Il tomba sur quelques mails qui pouvaient s’avérer être révélateur mais un traitant plus particulièrement d’Erilys attira son attention.
« Venez voir, il y en a encore. » From :
Jessica.carter@hotmail.com To :
Julian.carter@wanadoo.comObject : Ma petite fille
27/06/2012 at 12:33
Mon amour,
Je ne sais plus quoi faire avec Erilys, elle m’adresse à peine la parole depuis cette histoire de concours de musique, tu crois qu’on a fait une erreur ? Elle aime tellement ça, j’ai l’impression que la priver de cet avenir est une grosse bêtise, mais on ne peut pas se le permettre… Et si elle parvenait vraiment à percer là-dedans ? Et si quelqu’un la reconnaissait ? On ne peut pas avoir fait tout ça pour rien, ce sont nos enfants, je ne veux pas et je ne peux pas les perdre.
Désolée de t’embêter avec ça, ce n’est pas facile en ce moment.
Jessica
From :
Julian.carter@wanadoo.com To :
Jessica.carter@hotmail.comObject : Ma petite fille
27/06/2012 at 12:51
Ne t’en fais pas ma chérie, elle est en colère parce qu’elle est une adolescente et qu’à cet âge-là, tu sais bien qu’ils ont plus de mal à comprendre qu’on ne veut que leur bien. Elle t’aime, tu es sa mère ne l’oublie jamais.
Je t’aime, je rentrerais tôt ce soir on en reparlera. Julian.
Nathan imaginait sans peine que cela devait faire du mal à Erilys de comprendre pourquoi ses parents avaient catégoriquement refusé qu’elle se lance dans sa passion et il avait vraiment très envie de la prendre dans ses bras pour la consoler, mais il avait le sentiment que ce n’était pas le bon moment… Le cœur lourd, il continua de remonter le fil des mails et lorsqu’il arriva à la fin il annonça gravement que c’était tout, ce qui laissa flotter un petit silence entre les frangins qu’Eliana rompit.
« Quand ils rentrent, ils vont avoir des explications à nous donner. » Et tout le monde était bien d’accord.
Acte 5 : La fuite16 mars 2014 – Tout s’était passé très vite. Il y avait eu le don du sang avec les résultats sanguins. Il y avait eu ensuite la révélation de Nathan concernant les groupes sanguins ainsi qu’une photo et des rêves – souvenirs d’un passé antérieur ? Puis il y avait eu le bracelet de maternité avec les prénoms
« Eléa Maë » daté du 13 juillet 1995 – la date de naissance des jumelles – et les prénoms sortis tout droit d’un livre français qu’Eliana avait lu par accident et qui se trouvait dans la bibliothèque des parents. Enfin, il y avait eu la découverte de différents mails, l’un sur la mutation du père et la réelle raison de celle-ci, l’autre sur la fameuse photo de Nathan où leur mère semblait paniquée à l’idée que l’on voit une ressemblance avec la photo et Erilys. Il y avait eu également la découverte sur les raisons qui ont poussés leurs parents à refuser catégoriquement qu’Erilys fasse de la musique, pour ne pas qu’elle soit reconnue si elle se faisait un jour connaitre. Et le tout dernier indice, ou preuve, n’était autre qu’un article de journal datant de fin septembre 2003 concernant la possibilité que Lewistown – la ville où les Carter vivaient à cette époque – abrite les kidnappeurs de deux enfants, peut-être trois mais rien n’était encore certain. Tous ces évènements, une fois mis bout à bout, les avaient conduit à cet instant précis. Tout s’était déroulé très vite. Trop vite même. Les parents étaient rentrés, les enfants bouleversés. Ils ne désiraient qu’une seule chose : la vérité. Ils avaient commencé à les questionner, sur le départ précipité du Montana, sur la photo, sur les livres… Mais aucune réponse ne venait. Ils étaient las, las d’attendre, las de se demander si ce qu’ils pensaient être vrai l’était ou non, las de ces réponses qui n’en étaient pas. Ils ne voulaient rien d’autre que savoir et comprendre. Surtout comprendre. Il y avait eu des pleurs et des cris. Surtout des cris. Leurs parents ne voulaient pas comprendre. Ils ne voulaient rien savoir, prétextant qu’ils n’avaient aucune réponse à donner. Et c’est par hasard qu’ils se sont tous retrouvés dans la cuisine, près de la porte de la cave. Sans le vouloir, les enfants les avaient acculés contre cette porte fermée à clé le plus souvent. Ou bien, était-ce leurs parents qui avaient reculé de peur ou de honte ? Quoi qu’il en soit, Nathan vit qu’Eliana allait péter un câble et il n’eut pas le temps de la retenir quand du coin de l’œil il l’aperçut empoigner une casserole
« BOOOoonng » Fit l’ustensile de cuisine sur la tête de chacun des deux imposteurs. Malgré la situation, Nathan s’inquiéta du mal que venait de faire sa jeune sœur à leurs ‘parents’
« T’as p’t’être tapé un peu fort là, non ? » Il n’était pas forcément très paniqué, mais bien inquiet. Et si elle leur avait causé un traumatisme ?
« Tu... Tu penses ? Ils ne sont pas… Morts, Hein ? » Prenant une grande inspiration, Nathan s’empressa de prendre le pouls des deux adultes et de soulever leurs paupières pour s’assurer qu’il n’y avait pas de traumatisme crânien et une fois cette vérification faite, il put rassurer ses deux sœurs. Ensuite c’est lui qui prit naturellement la direction des opérations et ils attachèrent leurs deux parents sur une chaise dans la cave, les ligotant fermement pour éviter qu’ils puissent s’enfuir.
« Et maintenant, on fait quoi ? Ils ne veulent rien dire. Je doute qu’attachés ils diront quoi que ça soit de plus. » demanda Eliana. Nathan avait peur de faire une horrible connerie mais ils étaient déjà allez trop loin. Maintenant ils devaient aller jusqu’au bout.
« On attend. Ils ne parlent peut-être pas maintenant mais ils peuvent encore craquer. » Les jours suivants se passèrent à une lenteur infinie et chacun d’entre eux marquait une nouvelle étape dans leur vie de jeunes criminel. Il y eut des heures d’interrogations infructueuses, un mail envoyé au boulot de Julian pour justifier son absence, des coups qui partaient sans qu’ils le veuillent vraiment à cause de la frustration et les enfants Carter étaient de plus en plus moroses, taciturnes, distants les uns envers les autres, n’acceptant pas de réaliser ce qu’ils étaient en train de faire. Une longue semaine fut bientôt écoulée et Erilys ne pouvait plus le supporter, elle convoqua son frère et sa jumelle dans la cuisine et prit une grande inspiration avant de déballer ce qu’elle avait sur le cœur.
« Ils ne parleront pas, je le sais… » Commença-t-elle d’une toute petite voix.
« J’en peux plus, ce n’est pas nous ça… On ne peut pas continuer comme ça, regardez ce qu’on devient ! » De jeunes étudiants prometteurs ils étaient passés à délinquants sans scrupule, ça ne leur ressemblait plus du tout. « On reste enfermé ici, on ne voit personne, on ne va plus ne cours. Il faut arrêter. » Arrêter d’accord mais cette maison n’était plus la leur, peut-être même ne l’avait-elle jamais été.
« On va devoir partir. » Et Nathan partageait son avis. Mais partir où ? Îls l’ignoraient mais ils étaient certaine d’une chose, ils ne pouvaient pas rester une semaine de plus ici, ils ne tiendraient pas et leur union souffrait déjà du traitement qu’ils s’infligeaient actuellement.
27 mars 2014 – Ils s’étaient préparés avec application, ne laissant aucun détail au hasard et pourtant ils avaient dû agir vite. L’absence du boulot de leur père allait être difficile à justifier plus longtemps et ils ne pouvaient plus être là quand quelqu’un s’apercevrait que le quotidien de la famille Carter avait volé en éclat. Ils réfléchissaient à trois, prenaient des décisions à trois mais faisaient vite et sans laisser les désaccords se placer entre eux. Les parents allaient rester attachés, ils ne méritaient pas qu’ils leur fassent cette fleur, peu importait ce qu’il pouvait leur arrive, ce n’était plus vraiment leur problème. Erilys avait couru dans la chambre de leurs parents pour récupérer la liasse de billets qu’elle avait repérés lors de ses premières investigations. Ce n’était pas grand-chose, mais ils avaient besoin de sous pour leurs voyages et ils ne pouvaient pas emporter leurs cartes de crédits, ils seraient trop facilement repérables. En revanche Nathan comptait bien sur sa fausse carte d’identité qui indiquait qu’il avait 21 ans et qu’il s’était fait faire avec Adam lorsqu’il avait 19 ans. Un sac-à-dos chacun ce serait tout ce qu’ils emporteraient, ils avaient besoin de se déplacer vite et des valises étaient trop imposantes. Leurs téléphones portables avaient été vidé de tous les SMS qu’ils contenaient et se trouvaient sur le comptoir de la cuisine, eux aussi allaient devoir rester là, ils ne pouvaient pas se permettre de les prendre avec eux. En revanche Nathan comptait bien acheter un portable qu’il configurerait pour être protégé, avec un numéro qui demeurerait caché. Mais il devait au moins rester en contact avec Adam. Il c’était mis d’accord avec lui, il serait ses yeux et ses oreilles dans cette ville et il avait entièrement confiance en son meilleur ami de toujours. Il savait qu’il ne craquerait jamais, même devant Julian Carter, le soit disant grand flic. Rien que l’idée de devoir partir et de devoir tout quitter serrait violemment le cœur du jeune homme … Quitter ses études, ses habitudes, les personnes qu’il aimait, la fille pour qui il avait un faible depuis le lycée, son meilleur ami, sa voiture … TOUT ! Mais il ne pouvait pas rester et vivre dans un aussi grand mensonge. Désormais toute sa vie était chamboulée et ils couraient tous trois un grand danger. Ils ne pouvaient décemment pas se rendre au commissariat étant donné que Julian Carter était lui-même un policier avec une grande influence et qu’il n’aurait aucun mal à cacher les preuves et à faire passer ses ‘enfants’ pour des idiots. Après une certaine hésitation, il décida tout de même d’embarquer son pc (qui valait tout de même une petite fortune et qui contenait trop de données précieuses) et effectua à la va vite les manipulations nécessaires pour bloquer l’ordinateur et désactivée la géolocalisation de la carte.
Ils furent enfin prêts à partir, ne souhaitant pas repasser voir leurs parents avant leur départ, ils se retrouvèrent simplement dans l’entrée, devant cette porte qu’ils allaient franchir définitivement, laissant tout ce qu’ils avaient connu derrière eux. C’était effrayant, bien sûr, mais ils étaient ensemble et c’était tout ce qui comptait. Ils firent silencieusement leurs adieux à plus de 20 ans de leur vie et claquèrent la porte derrière eux, à la fois soulagés et effrayés par ce qui les attendait. Mais ils n’avaient pas le temps de se poser des questions, ils devaient partir loin d’ici le plus rapidement possible. La voiture de Nathan aurait pu les conduire jusqu’à la gare mais ils ne pouvaient pas jouer au petit poucet, la situation était trop grave, c’est donc en bus qu’ils choisirent de s’éloigner dans un premier temps, rejoignant la gare pour se rendre compte que les billets de train leur demanderait de débourser beaucoup trop d’argent. Ils finirent par dénicher des billets de car à des prix beaucoup plus abordables et en achetèrent trois pour le prochain départ, ne regardant même pas la destination, leur priorité était l’éloignement.
Leur voyage dura des semaines. Ils s’arrêtaient dans des villes au hasard mais n’y restaient jamais très longtemps, se contentant d’acheter le nécessaire avant de repartir, craignant bêtement d’être rattrapés par leur passé. Ils avaient la bougeotte et ne se sentaient en sécurité nulle part. Cependant, leurs économies n’étaient pas infinies et bientôt ils durent se rendre à l’évidence, ils allaient devoir trouver un endroit où se poser pendant un temps, trouver du boulot, reprendre leur vie et tenter de se reconstruire. Ce ne serait pas évident et les trois jeunes ignoraient tout de l’avenir auquel ils pouvaient prétendre désormais.
Juin 2014 – Siloam. Ils avaient découvert la ville un 19 mai, après avoir étudié une carte des Etats-Unis et choisi leur nouveau lieu de résidence un peu au hasard. Ils étaient arrivés complètement fauchés, perdus, esseulés et avaient mis beaucoup de temps à se reconstruire. Leur vie était d’ailleurs loin d’être parfaite et était pour le moins compliquée mais Nathan s’était promis de faire tout son possible pour que ses sœurs ne manquent de rien et qu’elles puissent continuer leur rêve, quitte à accumuler pleins de petits travails. Il réussit tout d’abord à décrocher un job en tant que barman et serveur dans un bar de la ville, mentant bien évidemment sur son âge sinon il n’aurait jamais eu le droit de préparer et de vendre de l’alcool, mais fausse carte d’identité à l’appui et démonstration de son talent dans l’art de faire des cocktails lui permit d’effacer tous les doutes de ses collègues et patrons. En plus de cela, il rendait de nombreux services aux habitants de la ville, particulièrement dans le domaine dans l’informatique quand ils avaient le moindre problème. Il s’arrangeait aussi pour donner des cours aux collégiens et lycéens. Tout cela lui permettait de payer leur loyer et de vivre relativement normalement. Il était fatigué mais il tenait le coup, et il faisait tout ça pour les trois. Même s’il n’avait aucun lien de sang avec les filles, il les considérait quand même toujours comme ses sœurs. Les liens du cœur sont aussi énormément importants. Et même si Eliana semblait s’éloigner petit à petit de lui, il restait accroché à l’idée qu’ils ne se sépareraient pas de sitôt. Après tout, sans elles il n’avait personne. Toutes deux étaient jumelles, elles avaient un lien assuré, lui n’avait plus rien. Il avait parfois l’impression d’être le vilain petit canard… Mais ce vilain petit canard désirait plus que tout au monde que ses sœurs puissent reprendre leurs études et vivre leur rêve. Quitte à se sacrifier.
Juin 2015 – Plus d’un an désormais qu’ils avaient élu domicile à Siloam et même si leur vie n’est pas devenue exceptionnelle, les choses avançaient et Nathan avait l’impression de trouver sa place. Cependant, il continue d’effectuer des recherches de son côté sur son passé. Sur leur passé. Il n’est pas persuadé que cela ferait plaisir aux filles d’apprendre ce qu’il trouve mais lui a besoin de savoir. Pourquoi. Pourquoi lui ? Qui était sa famille ? Et celle des filles ? D’où viennent-ils tous ? Leurs parents biologiques ont le droit de savoir qu’ils sont encore en vie alors qu’ils s’imaginent sans doute qu’ils sont morts depuis le temps. En tout cas, Nathan est bien déterminé à trouver les réponses à toutes ses questions.