Brother & Sister

Shoshana & Lewyn

My life, it comprises of losses and wins and fails and falls.

Affaire classée. Je posais le dernier dossier de cette interminable pile dans le carton des affaires terminées. Chaque carton que je terminais de remplir provoquait en moi une certaine nostalgie. Plus jamais je ne me pencherais sur cette affaire, elle était close. Mon client s’en était tiré plus ou moins bien, mais dans tous les cas, il continuait sa vie de son côté et moi de la mienne. Des chemins qui se croisent pour ne plus jamais se retrouver à nouveau. Je soupirais et fermais le carton avant de le poser dans un coin. J’irai le poster aux archives plus tard, pour l’instant je devais régler un détail. Ma très chère assistante se trouvait dans un coin de la pièce, le nez vissé sur son ordinateur, peut-être même ne travaillait-elle pas, je m’en contrefichais. Tout ce que je savais c’est que je souhaitais que son stage se termine le plus vite possible afin qu’elle dégage de là et me laisse de nouveau en paix avec moi-même, dans mon bureau. Je jetais de temps à autre un regard vers elle. Il fallait reconnaître qu’elle dégageait un charme fou. J’avais tenté à plusieurs reprises au début de notre collaboration une approche, mais rien n’y faisait. A chaque fois elle m’avait repoussé et ce sans ménagement. Mademoiselle devait avoir sa fierté propre pour ne pas finir au lit avec un homme de huit ans son aîné. Mais peu importait, depuis je la haïssais. Tout son être ne m’inspirait que la haine. Ses cheveux ardents, ses yeux verts aussi profonds que les miens. Je regardais la pile de dossier qui restait en vrac sur mon bureau. Je me devais de les trier par ordre alphabétique pour mes prochaines entrevues avec mes clients. Je n’avais cependant pas que ça à faire, il fallait encore que j’appelle le tribunal pour connaître les dates des prochaines audiences et souvent cela prenait un temps fou. La secrétaire n’était pas une rapide, si vous voyez ce que je veux dire. Je rassemblais donc la paperasse qui s’entassait là pour en faire une pile à peu près propre. Je les soulevais et vint poser le tout sur le bureau de Shoshana. Du ton ironique qu’elle devait si bien connaître je lui lançais : « Pour toi mon ange. Tries moi ça par ordre alphabétique. Ça devrait être dans tes cordes non ? » Les piques fusaient depuis quelques temps. Son stage prenait fin dans un peu plus d’une semaine et je jubilais rien qu’à l’idée de lui souhaiter bon vent et de ne jamais la recroiser. Au fond je ne sais pas trop pourquoi je passais mes nerfs sans arrêts sur elle, mais tout en elle transpirait quelque chose qui m’était familier. En réalité je voyais très bien, son caractère bien trempé, sa répartie cinglante, ses airs supérieurs et surtout cette droiture me rappelait totalement mon père. Un être que je préférais oublier. La pauvre n’y était pour rien, elle était tombée avec moi. Fichu tour du destin pour la pauvre demoiselle.

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Cela fait déjà pas mal de semaines que je suis stagiaire dans ce cabinet d'avocat. Pour moi, c'était l'opportunité parfaite pour mieux enrichir mon CV et aussi, et surtout, pour acquérir de l'expérience professionnelle pour mon futur métier. Avocate. Depuis des années, avant même d'avoir fini mes années lycée, c'était mon rêve. Je me suis réveillée un jour et j'avais envie de devenir avocate. C'était comme une sorte d'évidence. Et plus j'y pense, plus je me demande si ce n'était pas quelque chose d'héréditaire, vu que mon père était avocat aussi. A ce moment-là, j'ignorais que son fils, c'est-à-dire mon demi frère, l'était aussi. Ma surprise était alors grande en apprenant que j'allais être l'assistante d'un certain Lewyn Keynes. Et comme par hasard, c'était bien mon demi-frère. Le hasard fait bien les choses, non ? Après tout, Siloam Springs est une petite ville, ça pouvait être compréhensible, mais je me suis plusieurs fois demandée ce que faisait Lewyn ici. N'était-il pas supposé être en Alaska ? Là où mon 'père' était parti pour rejoindre sa vraie famille, abandonnant ma mère, et moi-même, seules ici.
Plus le temps passait, moins j'essayais de comprendre comment Lewyn s'est retrouvé ici. A vrai dire, tout ce dont à quoi je pensais dernièrement, c'est de m'approcher de lui. Je me sens seule dernièrement. Maman est en train de partir, petit à petit, et ça me tue de savoir que je ne peux rien faire pour elle, pour qu'elle aille mieux. Rien à part être avec elle chaque jour, pour lui donner ses médicaments, et discuter un peu, avec une Mona fatiguée, mais qui faisait des efforts pour pouvoir faire la conversation. Prenez moi pour une égoïste, mais une fois que ma mère m'aura quittée, je me retrouverais seule, et je ne veux pas être seule. Ce serait trop dur pour moi. Ce n'est pas comme si mon père était là pour me dire qu'il ne me laissera pas, et qu'il sera là à mes côtés. Il n'a jamais été là. Lewyn est donc ma dernière chance de ne pas être seule. C'est mon demi-frère, et si pendant des années j'ai cultivé une sorte de haine envers mon père, je ne veux pas faire la même chose avec ce jeune homme devant moi, à son bureau, même s'il se montre de plus en plus désagréable avec moi. Pourquoi ? Parce que je l'ai repoussé. Si seulement il savait. J'ignorais même s'il était au courant de la petite histoire de son père avec ma mère. Pour l'instant, je ne lui ai rien dit, mais je vais quitter le cabinet dans pas longtemps. Peut-être qu'il est temps...
« Bien sûr. Les anges savent quand même faire pas mal de choses ! »
C'était ma réponse à sa question, posée avec un ton ironique, comme d'habitude. A ce stade, il devait avoir compris que j'avais un bon sens de la répartie, et que je ne me laissais pas faire. Derrière ce visage angélique, et ce regard vert perçant, j'avais toujours mon mot à dire. D'ailleurs, en parlant de regard vert perçant, on avait le même. Je pense bien que niveau ressemblance physique, c'est le seul détail que j'ai eu de mon père.
« Vous avez besoin d'autre chose, monsieur Keynes ? »
Même si je me montrais comme ça, un peu hautaine, sûre de moi, j'avais quand même pas mal d'appréhensions. Je ne savais pas quel serait le bon moment pour pouvoir parler de nos gènes semblables, ou comment en parler.

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« Bien sûr. Les anges savent quand même faire pas mal de choses ! » Sa répartie me fit naturellement sourire. C’est exactement le genre de phrase que j’aurai moi-même répondu à un patron un peu trop hautain comme je m’amusais tant à en interpréter le rôle. Elle me lança son regard vert perçant, dont la couleur détonnait avec la mienne, ce regard vert face au bleu glacier du mien, mais nos deux iris se répondaient en parfaite harmonie. Il y avait quelque chose dans ce regard qui nous liait, un peu comme une famille. Et je trouvais cela extrêmement dérangeant car personne ne m’avait jamais lancé ce regard. C’était censé être ma marque de fabrique, tant pour la drague que pour exprimer mes sentiments profonds tels que la colère ou le mépris. Elle ajouta alors que j’allais retourner à mes propres problèmes : « Vous avez besoin d'autre chose, monsieur Keynes ? » Autre chose ? Oui bien entendu j’avais besoin d’un millier de chose dans cette foutue vie. D’abord je voulais qu’elle me fiche la paix. Ensuite qu’elle arrête de me regarder avec ses yeux là. Et enfin qu’on m’accorde un congé. Je voulais souffler, me poser et prendre du bon temps. J’avais aussi une irrésistible envie de revoir Taryn. Je songeais un peu trop souvent à elle à mon goût. J’aurai voulu qu’elle soit là ce soir quand je rentrais chez moi, qu’elle m’appartienne. Qu’elle soit mienne. Alors en attendant je rongeais mon frein. J’étais terriblement en manque d’amour en réalité, qu’il soit issu d’un réel amour ou bien d’un amour familial. Je ne voyais presque plus ma mère. Mon père était mort et ne m’avait jamais témoigné la moindre affection. Et je n’avais personne d’autre. J’étais une ombre qui vagabondait dans sa propre vie, sans réel but. La famille pour moi c’est quelque chose qui a véritablement un sens, mais quand on en possède pas ou peu, le sens s’en évapore. Je ravalais mon désespoir et répondit sèchement. « Non ce sera tout. » J’allais retourner à mon bureau pour couper court à cette conversation puis me ravisait. « Pourquoi avoir choisir ce cabinet mademoiselle Mohn ? Pourquoi être venue ici ? Vous n’avez pas dans votre famille quelqu’un pour vous accueillir à bras ouverts et lancer votre carrière le plus rapidement possible ? Car honnêtement ici en stage vous ne me servez à rien et je ne vous sers à rien non plus. » Techniquement ça se voulait méchant, mais sur la fin j’avais flanché. Pourquoi donc devais-je toujours endosser ce rôle ? Peut-être parce que je n’aimais pas les adolescentes qui me résistaient ? Ou tout simplement parce que j’avais besoin de quelqu’un pour passer mes nerfs ? Toutes ces questions me vrillaient la tête et je souhaitais que la journée se termine rapidement.

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Si j'ai hérité mes cheveux flamboyants de ma mère, il paraît que mon regard est pareil que celui de mon père. Je le vois à travers le regard de Lewyn, qui est pareil que le mien. C'est la seule chose qui nous liait à ce moment-là. J'ignorais s'il savait que quelque part dans ce monde, il avait une demi-sœur. J'ignorais s'il la cherchait, s'il ME cherchait, dans le cas où il serait au courant. Plusieurs questions trottent ma tête. Je pense à cela tous les jours. Et petit à petit que je m'approche de mon dernier jour au cabinet, j'y pense encore plus. J'ai beau avoir cultivé des sentiments de haine envers mon père qui n'a jamais cherché à me connaître, mais j'ai là, devant moi, mon demi frère, en chair et en os, et honnêtement, s'il y avait une petite chance qu'il veuille m'accepter dans sa vie, je ne dirais pas non. J'ai grandi sans père, une présence masculine dans ma vie ne me ferais pas de mal. Non pas que je manquais de quoi que ce soit avec ma mère, au contraire, elle a tout fait pendant toutes ces années pour que je ne sente pas ce manque. Et pourtant. Maman va me quitter un jour ou l'autre, j'ai fini par accepter cela, à contrecœur, et je ne veux pas me retrouver seule.
Depuis que j'ai refusé les avances de Lewyn, celui-ci passait son temps à me lancer des remarques désagréables. Je travaille peut-être pour lui, je veux me rapprocher de lui certes, mais il n'est pas question que je me laisse marcher sur les pieds. Le sens de la répartie, ce n'est pas ce qu'il me manque et ça, Lewyn a sûrement dû le remarquer. Et puis, il faut dire que lui aussi a toujours quelque chose à rajouter, comme c'est le cas maintenant, lorsqu'il me demande ce que je faisais là.
« Ce n'est pas comme s'il y avait 10 000 cabinets d'avocats à Siloam Springs, vous savez. »
J'affiche un sourire au coin de mes lèvres lorsqu'il me demande si je n'avais pas un membre de ma famille qui pourrait me lancer. Un sourire à la fois amusé et sournois.
« On a pas tous la "chance" d'avoir eu un père avocat dans les parages pour faciliter la tâche. Et puis croyez-moi, je préfère passer mes journées avec ma mère mourante que d'être ici; mais je dois passer par ce stage si je veux avoir mon propre cabinet et une assistante que je traiterai bien. »
Et voilà, c'est dit. Mon regard ne quitte pas le sien. Pas question de flancher. J'ai peut-être dit quelque chose d'assez personnel, concernant ma mère, mais c'est sorti comme ça, sans pour autant que je n'en devienne vulnérable.

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« Ce n'est pas comme s'il y avait 10 000 cabinets d'avocats à Siloam Springs, vous savez. » Effectivement je le concevais. N’empêche, pourquoi moi alors ? Je n’avais absolument pas besoin d’une assistante en ce moment. Enfin si pour faire les tâches ingrates… me souffla ma conscience. Néanmoins je ne voyais pas pourquoi on m’avait refilé à moi une stagiaire. J’avais beaucoup de collègues, dont l’amabilité n’était plus à refaire contrairement à la mienne, et j’avais du mal à percuter la raison de son affiliation à mon secteur. Mais il n’était plus réellement temps de se poser la question puisque cette jeune demoiselle allait bientôt quitter les lieux. « On a pas tous la "chance" d'avoir eu un père avocat dans les parages pour faciliter la tâche. Et puis croyez-moi, je préfère passer mes journées avec ma mère mourante que d'être ici; mais je dois passer par ce stage si je veux avoir mon propre cabinet et une assistante que je traiterai bien. » A cet instant je tiquais. Comment ? Oui comment sait-elle cela. Mon père était réputé mais en particulier en Alaska. Malgré des voyages d’affaires fréquents je n’avais pas le souvenir qu’il soit devenu connu, en particulier à Siloam Springs. Je balayais la fin de sa phrase qui pourtant aurait pu me prendre en pitié et ne relevais même pas sa pique. Je la traitais mal la petite Shoshana et j’assumais pleinement. Mais le coup de mon père… Et sa façon de parler de lui au passé. Comment connaissait-elle autant de choses ? Cela m’intrigua fortement et je cessais mon manège dans la pièce pour venir me poster, une fesse appuyée sur le bureau, les bras croisés et mon regard vrillé dans le sien. « La "chance" dites vous… Je ne suis pas certain que ce fut une chance d’avoir un père comme le mien mademoiselle Mohn. » Les lèvres pincées je songeais à mon enfance quelque peu chaotique, élevé loin de l’amour paternel dont un fils à énormément besoin. Je cessais mon sourire pour reprendre. « Comment connaissez-vous mon père ? » La question n’appelait à aucun mensonge. Je voulais savoir si cette fille avait déjà eu une quelconque relation avec mon père. Je voulais le connaître à travers les yeux de quelqu’un d’autre. Savoir s’il était réellement le parfait connard que je me représentais et dont l’image demeurait inchangeable à mes yeux. Je haïssais mon père.

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Ce cabinet d'avocats était le seul que je connaissais à Siloam Springs, et ma demande de stage y a été acceptée. Cependant, ma surprise fut grande lorsqu'on me dit que je serais l'assistante d'un cerain Lewyn Keynes. Le nom est le même que celui de mon père, et ça m'a intrigué. Après la fin de ma première journée, je suis allée chercher quel lien reliait Lewyn et mon père. Et il s'est avéré que l'avocat n'est autre que mon demi frère. Toutes ces semaines passées dans son bureau n'étaient donc pas faciles pour moi. Entre le caractère assez désagréable de Lewyn avec moi, et le fait que j'aie décidé d'essayer de me rapprocher de lui, le tout ne marchait pas vraiment comme je voulais. J'étais tout le temps victime de ses remarques désobligeantes, et je ne suis pas du genre à me laisser marcher sur les pieds, alors je lui répondais, sans pour autant risquer de me faire virer. Sauf que cette fois, je suis peut-être allée un peu loin, vu que je parle du père de Lewyn. De mon père. Mais ce détail, il l'ignore sûrement. Lewyn a d'ailleurs l'air surpris lorsque je parle de son père. « Au moins vous avez eu un père. » J'ai prononcé ces paroles plutôt pour moi que pour lui, je ne sais donc pas s'il a entendu ce que j'ai dit. Sa question attire ensuite mon attention, et je pose finalement mon regard sur lui. Nos regards semblables se croisent et j'affiche un léger petit sourire, alors qu'au fond, je ne savais pas vraiment quoi dire. Je ne peux tout de même pas lui lancer la vérité comme ça, d'un seul coup, ce serait comme une claque venue de nulle part pour lui. « Oh, j'ai juste entendu parler de lui, il y a des années déjà. Je ne le connais pas vraiment à vrai dire. » Mon regard ne quitte pas le sien. S'il me demande comment je le connais, c'est qu'il doit se douter de quelque chose non ? J'ignore s'il sait qu'il a une demi-sœur quelque part. Je sais qu'un jour ou l'autre, je devrais lui dire la vérité, et après libre à lui de prendre une décision : ne pas accepter cette vérité et me tourner le dos, comme a fait mon père ; ou essayer de se rapprocher de moi et pourquoi pas avoir un lien de fraternité.

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« Au moins vous avez eu un père. » Je soupirais, un sourire aux lèvres. Si tu savais mon ange, parfois j’aurais préféré ne pas en avoir. Je me gardais bien de lui souffler ces mots. Elle semblait elle-même s’être parlé à elle-même. Décidément cette jeune fille me ressemblait plus que je ne voulais bien l’admettre. Elle me répond ensuite. « Oh, j'ai juste entendu parler de lui, il y a des années déjà. Je ne le connais pas vraiment à vrai dire. » Je tique. Son ton est anormalement taquin. Elle me cherche. Elle a quelque chose à dire, elle le cache, ça crève les yeux. Hors je suis quelqu’un qui n’aime pas que l’on me cache des choses. Surtout quand cela concerne mon entourage. Je ne détache pas mon regard du sien et nous nous livrons une bataille sans fin. Si des éclairs pouvaient jaillirent de chacune de nos pupilles, il est certain que la pièce en serait rempli. L’électricité qui s’est chargée dans l’air est palpable. Qui de nous deux craquera le premier… ? J’ai bien peur que ce ne soit moi. Je la questionne alors doucement, pour ne pas la brusquer comme j’en ai l’habitude. « Mademoiselle Mohn, il me semble que vous en savez plus que vous ne voulez bien l’admettre. Que me cachez vous donc ? Si c’est à propos de mon père, je pense avoir le droit de savoir étant donné qu’il était un membre à part entière de ma famille. » Mon père est toujours resté une énigme pour moi et j’aurais parfois bien besoin d’en savoir plus sur lui. Peut-être cette jeune fille est-elle la clé de toutes mes questions ? Peut-être pourra-t-elle m’apporter ce que je n’ai pas eu. « Votre stage est bientôt terminé, vous n’avez rien à craindre, si des secrets vous avez… » Un sourire amusé se dessine sur mes lèvres. Un sourire charmeur, un sourire de confident. Elle peut se confier à moi, je ne lui en tiendrais pas rigueur. Peu importe de quoi retourne ce qu’elle a à me dire, je suis prêt à l’excepter.

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Mon regard et celui de Lewyn en disait bien des choses. Je montre mon côté confiant, fier, et lui a l'air de faire de même. Sauf que moi, au fond, j'ai des craintes. Peut-être que c'est le bon moment pour lui dire la vérité ? Mais comment ? Je ne me voyais pas le lui lancer d'un seul coup. Je voulais savoir s'il était au courant de quelque chose d'abord, n'importe quel détail qui le laisserait lui-même deviner de quoi je lui parlais. Mais s'il ne savait rien de cette histoire, ce sera clairement plus dur pour moi. Pourquoi tout doit être dur pour moi ? Des fois, je me demande comment je peux encore tenir, après tout ce que j'ai pu vivre pendant mes vingt ans sur Terre.
Je garde mon regard sur Lewyn, qui prend la parole par la suite, me parlant un peu plus doucement qu'il en a l'habitude. J'ai donc attisé sa curiosité, c'est déjà une bonne chose à mon avis. Il voulait savoir ce que je cache, il sait que je cache quelque chose. Je baisse la tête quelques instants avant de me lever de ma chaise, faire deux petits pas, puis m'asseoir à moitié au rebord de mon bureau. Il me dit de n'avoir peur de rien, qu'après tout mon stage était presque fini. Mais je ne pouvait m'empêcher d'avoir des appréhensions. Et s'il me croyait pas ? C'est une hypothèse fort possible, vu son caractère. « Chaque famille a un secret, n'est-ce pas Monsieur Keynes ?» Dis-je, ne sachant pas comment aborder le sujet, sans le brusquer. Peut-être que si je lui dis ça, il pourrait penser à un secret que lui aurait dit son père, notre père. Ou peut-être qu'il n'est juste pas au courant de ce secret. « Et je pense que ce serait...normal qu'un père raconte un secret à son fils avant de s'éteindre, peut-être pour calmer sa conscience. » En disant ces mots, je repose encore mon regard sur Lewyn. Je guette ses réactions, celles-ci pourraient peut-être me dire s'il était au courant de quelque chose ou pas.

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D’un ton énigmatique Shoshana me questionne : « Chaque famille a un secret, n'est-ce pas Monsieur Keynes ?» Cette rouquine m’intrigue de plus en plus. Moi qui a la base la considérait simplement comme une proie facile – ce qui s’est avéré faux – je la vois maintenant comme une source de renseignement. Est-elle en réalité un agent de FBI infiltré dans mon cabinet ? Ou alors pire connait-elle des secrets défenses sur ma famille que moi-même j’ignore. Je commence à me monter des films en épingle à cheveux… Mon père était peut-être un mafieux ? Il menait une double vie ? Ou je ne sais quoi d’autre d’aussi saugrenu qui me passa par la tête à cet instant. « Et je pense que ce serait...normal qu'un père raconte un secret à son fils avant de s'éteindre, peut-être pour calmer sa conscience. » Ses yeux ardents se posent sur moi. Elle guette une réaction. Elle attend que je me jette sur elle pour savoir ce qu’elle cache derrière ses énigmes. Je reste calme, posé. Il ne faut pas qu’elle me perce à jour. Ses mots résonnent dans mon esprit, s’entrechoquant, cherchant une signification plausible. Elle sait quelque chose que tu ignores… Rien que cette perspective m’énerve. Je déteste quand quelqu’un a le pouvoir de me déstabiliser. Alors au lieu de tourner autour de pot, j’y vais franco. « Que savez-vous à propos de mon père ? » Si elle refuse de me dire la vérité, je me verrais dans l’obligation d’appuyer mon propos par un chantage mesquin. Son stage s’achève dans peu de temps, et je suis garant de remplir toute la paperasse. Il se pourrait que ma plume dérape et se transforme en un paragraphe retraçant comment Miss Mohn s’est extrêmement mal comportée au cabinet… Mais ça je el garde sous le coude, attendant de voir comment elle réagit à ma question.

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