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Depuis mon retour de l’hôpital, je tourne en rond comme un lion dans sa cage. Bien sûr, je vois Nyméria, mais je la vois un peu moins qu’avant. Je ne passe plus beaucoup à la boulangerie il faut dire, puisque je sors assez rarement de la maison. Mes occupations se résument généralement à regarder des films ou des séries débiles à la télé, me saouler malgré les contre-indications sur les bouteilles de médicaments que le docteur m’a prescrit et me promener dans la salle d’exercice que j’ai emménagé au sous-sol avec nostalgie. En bref, j’ai vraiment une vie pourrie ces temps-ci, mais le pire est probablement le sujet Azalyne. Ma mère m’en parle fréquemment, me demandant des nouvelles. Le problème, c’est qu’elle ne m’en a jamais donné. Au début j’avais tenté de lui envoyer un texto. Il est encore dans mon téléphone, je n’ai pas encore osé appuyer sur « envoi » depuis trois semaines. Je suppose que c’est à elle de faire le premier pas, c’est elle qui s’est sauvé sans explications après tout.
Ça me confirme qu’elle me fuit sans doute car elle est au courant. Elle veut probablement prendre ses distances et veut faire passer le message doucement, ou elle ne sait tout simplement pas comment me le dire. Dans tous les cas, je regarde mon téléphone et relis les archives de conversations avec une boule dans la gorge. Je n’ai pas le courage de les supprimer, je me dis que c’est impossible, qu’elle va bien finir par m’adresser la parole un jour.

C’est pour cette raison que lorsque l’infirmière avec qui je devais faire mon suivi aujourd’hui m’annonce qu’elle va donner mon dossier à quelqu’un d’autre temporairement, je pense directement à Azalyne. Je sais qu’il n’y a pratiquement aucune chance qu’elle puisse se charger mon dossier car elle est sûrement occupée, mais je suis surpris lorsqu’on me répond qu’on va tenter le coup. Je demande tout de même à la préposée de ne pas lui dire qu’il s’agit de moi. Je sais qu’elle va refuser si c’est le cas. Sinon elle m’aurait déjà donné des nouvelles, je suppose. J’attends patiemment, retirant mon t-shirt et mon pantalon. Lors de l’opération, ils avaient retiré des éclats de métal près de ma hanche, résultat; au moins six mecs m’avaient vu pratiquement à poil dans les trois dernières semaines, et de pas mal trop près à mon goût.
Je dépose mon t-shirt sur mes cuisses et attends patiemment, assis sur le lit en fixant la porte. J’espère qu’ils vont trouver Azalyne, même si en même temps la confronter en sous-vêtements n’est pas la meilleure façon de faire. Je suis déjà beaucoup moins amoché que pendant les deux premières semaines, c’est déjà ça je suppose.

Finalement la porte s’ouvre, Aza apparaît, tête baissée. Elle fuit mon regard et se met à parler rapidement. Elle me dit qu’elle préfèrerait ne pas être là elle aussi, et que ce n’est que pour rendre service à sa collègue. Même en s’asseyant devant moi sur le petit tabouret, elle ne m’adresse pas un regard. Je fronce les sourcils. Puis en l’entendant me demander de retirer mon t-shirt, je me racle la gorge et lui jette le vêtement sur les genoux. « Et si tu me regardais au moins en face ça aiderait sans doute aussi, tu sais. » Je suis sarcastique. Savoir que j’avais raison sur toute la ligne me blesse énormément, plus que je ne l’aurais imaginé. « Alors, tu comptais me donner signe de vie un jour, ou bien tu as finalement décidé que ton copain te convient parfaitement et que t’as plus besoin de moi? » Je n’ai aucun souvenir du baiser, ni de tout ce qui s’est passé. Je ne suis pas certain si je lui ai dit que je suis amoureux d’elle.

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Je bouillonne alors que je l’entends défendre son petit ami, Seth qu’il s’appelle apparemment. Elle dit qu’elle avait besoin de recul, mais du recul à propos de quoi, au juste? Elle ne m’a rien dit du tout, elle est juste partie sans me donner la moindre explication, alors comment est-ce qu’elle peut se dire que je pourrais comprendre dans sa situation? Je soupire, vraiment agacé lorsqu’elle parle de Nym. Pourquoi elle la ramène toujours sur le tapis. Elle ne la connait même pas, et je lui ai déjà dit qui elle est. Et de toute façon, qu’est-ce que ça peut lui faire, c’est pas comme si je suis en couple avec elle non plus. « Arrête avec Nyméria, c’est juste une amie. Oui, on couche ensemble, mais figure-toi que c’est plutôt mort ces temps-ci dans mon pantalon, je t’évite les détails. » En fait, je le sais, je veux simplement qu’elle me le dise, qu’elle me le confirme. Je veux au moins clore ce chapitre pour finalement passer à autre chose.

Je frissonne en sentant ses doigts sur ma plaie. Elle touche mon bras, et se met à inspecter la plaie, qui a commencé à cicatriser. Azalyne me pose les questions de routine, à savoir si parfois la plaie me démange ou tire, et elle semble complètement ignorer le problème auquel on semble tous les deux faire face. Elle ne m’a donné aucunes explications et ne semble pas prête de le faire. Il faudra que je la confronte moi-même on dirait. Tant pis.
Je pousse un soupir et prends son poignet de ma main libre, lui faisant cesser tout ce qu’elle fait pour qu’elle porte son attention sur moi. Mon regard se plante dans le sien, je commence à perdre patience, ce qui est plutôt rare chez moi. « Est-ce que tu peux arrêter de faire semblant, s’il te plaît? Je peux pas me mettre à ta place Aza, tu m’as jamais donné d’explications. Tu disparais sans rien dire, et puis là après trois semaines, tu vérifies mes plaies comme si rien s’était passé? » Je me passe une main dans les cheveux, puis gratte ma barbe des quelques derniers jours. À force de ne pas sortir, j’ai zappé ce genre de détails aussi. « Désolé, Aza, mais je marche pas. J’ai besoin d’au moins un minimum d’explications. » J’ai visiblement laissé tombé le sarcasme et ma dernière demande ressemble presque à une supplication. Je veux juste savoir, me faire au moins une idée.

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Elle me rabâche les oreilles avec ses explications bidons, qu’elle doit s’occuper de moi car c’est son job et qu’elle ne voudrait pas avoir ma mort sur la conscience. Le baratin habituel, sauf qu’elle semble plutôt fâchée que je l’aie stoppée dans son geste. Je sens ses mains descendre sur mon ventre jusqu’à ma plaie et je me crispe légèrement, le contact est étrange. Au début je crois qu’elle ne fait que vérifier l’était de la blessure, mais elle n’y pose même pas un regard. En fait, elle ne semble pas consciente de son geste, puisqu’elle se met plutôt à me questionner. Finalement, j’aurai peut-être ma réponse. Je hoche la tête négativement, lorsqu’elle me demande si je me souviens réellement de rien. Ça me vexe un peu qu’elle me demande si je me fous encore d’elle, car je n’aime pas qu’elle ait cette opinion de moi, surtout qu’il me manque apparemment pas mal d’informations sur ce qui s’est passé l’autre jour.

Elle me dit qu’elle ne sait plus quoi penser et elle se lève, ses mains se détachent de ma peau, à mon grand regret. Le contact n’était pas déplaisant, même si un peu étrange dans de telles circonstances. Je continue de la regarder, espérant avoir une réponse à toutes mes questions. J’essaie de trouver des indices dans son regard, mais tout ce que je vois, c’est qu’elle semble effectivement perdue. Elle joue dans ses cheveux et de cette façon, je peux me concentrer sur ce qui est en train de se passer. La scène est surréaliste, et les mots qu’elle dit me font l’effet d’une bombe, même s’ils pourraient très bien ne vouloir rien dire.
Et si en fait, c’était réciproque? Et si c’était ça le problème? Je regarde Aza, confus. Moi aussi je suis perdu, peut-être même plus qu’elle, en fait. J’avale ma salive, mais j’ai la bouche sèche. Je me lève à mon tour, sans vraiment penser à toutes les conséquences de mes gestes. Je suis tellement plongé dans mes illusions que je me fous bien du reste.

Je m’avance vers Azalyne, lentement, pour ne pas la brusquer. Je regarde le sol quelques secondes, il ne faut pas que j’hésite, sinon je vais tout faire foirer. « Aza… » Je prononce son prénom presque en murmurant, puis je me tais. Mes mains prennent doucement celles de la jeune femme, et je les dépose sur mon torse. Je frémis un peu, et mon visage se penche vers le sien, mon regard plonge à nouveau dans le sien. « Qu’est-ce qui s’est passé? » Je ne pense pas aux détails comme par exemple que je risque de me prendre une énorme gifle, ou qu’elle est en fait perdue parce qu’elle pense à son copain dans l’histoire. Dans mon esprit, tout est parfaitement légitime.

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Pendant quelques secondes, j’ai l’impression que mon cœur s’est arrêté de battre. Je n’entends qu’un cillement dans mes oreilles alors que sa phrase maladroite se répète dans ma tête. Elle le sait, donc. Mais elle ne mentionne rien à propos d’elle. Ne vient-elle pas de dire qu’elle est perdue? J’ai soudainement très chaud, et pourtant je frissonne. Elle évite à nouveau mon regard, et je ne veux surtout pas qu’elle se mette à m’ignorer. Pas maintenant. Je veux savoir pourquoi elle est si perdue. Ma main se pose sous son menton, pour relever sa tête doucement. Je la regarde dans les yeux, et j’oublie totalement tout ce qui se passe autour. J’ai l’impression d’être dans une autre dimension, où j’ai enfin le droit de faire ce que je veux. Mon visage se rapproche du sien, et mon souffle se mêle au sien. « Je suis vraiment désolé Aza. » Je l’attire vers moi et plaque mes lèvres sur les siennes. Je perds rapidement le contrôle, et mes mains se posent sur ses hanches. Je pense à la soirée chez moi, lorsqu’elle était saoule et moi aussi, lorsqu’elle m’a repoussé. Mon étreinte se referme un peu plus, comme de peur que ça se reproduise, puis sans détacher mes lèvres des siennes, je recule à nouveau vers le genre de lit d’auscultation, puis m’arrête alors que je m’y heurte.

Je détache mes lèvres des siennes. Je me suis excusé surtout pour ça, pour le baiser. Je donnerais n’importe quoi pour un peu plus, mais je suis prêt à accepter si elle me demande de disparaître. Je m’assois sur le lit, me penchant un peu pour être à la hauteur d’Aza. « J’ai essayé de te le dire, mais c’était jamais le bon moment. Je voulais pas te blesser. Puis y’avait Dylan… » Je me tais, ça ne sert à rien d’essayer de me défendre de toute façon, je lui ai probablement dit une quantité de conneries incroyable la dernière fois. Je continue de parler. « Je vais disparaître si tu veux. Te laisser tranquille, du moins en attendant que tu sois moins perdue. » Ma main se pose sur son visage, et je glisse une mèche de cheveux derrière son oreille. Je ne regrette pas de l’avoir embrassée, mais je regrette aussitôt ma proposition de disparaître. Je ne veux pas disparaître de sa vie. Je veux être la seule personne dans sa vie. Je ne peux quand même pas lui dire ça, ce serait égoïste.

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Je retire ma main délicatement, mais Azalyne la retient. Je fronce les sourcils à mon tour alors qu’elle me dit qu’elle ne veut pas que je parte, et qu’elle ne veut pas me perdre même si elle se sent perdue. Elle doit être sous le choc, c’est tout. Son regard transperce le mien, et je cherche quelque chose à lui dire pour la rassurer, même si je ne crois pas être en mesure de le faire en ce moment. Je n’ai pourtant pas le temps de lui dire quoique ce soit qu’elle m’embrasse, et mon cœur se met à battre à tout rompre. Elle ne sait pas ce qu’elle fait visiblement, ou peut-être qu’elle le sait justement? Je n’en sais rien. Je prolonge le baiser et ma main glisse sur son bras. Je me détache d’elle quelques secondes et descend rapidement du lit avant de la regarder. Je ne sais pas quoi faire, franchement.

« Aza… » Je ne trouve pas quoi dire, parce qu’une partie de moi, complètement rationnelle, me crie que c’est la bonne chose à faire. Pourtant, je ne peux pas m’empêcher de penser que si c’est ce qu’elle veut, je ne fais rien de mal. Je regarde Azalyne devant moi, qui tremble et qui semble déboussolée, et je flanche. « Et puis merde, quoi. » Je ne jure pas très souvent, mais sur le moment, rien d’autre ne peut sortir. J’attire la jeune femme vers moi et l’embrasse à nouveau, et sous l’impulsion, je la dépose sur le lit, exactement où j’étais il y a une minute à peine. Mes lèvres glissent sur son menton, puis dans son cou, alors que mes mains se resserrent sur ses cuisses. J’ai envie d’elle maintenant, au diable les médecins et leur repos forcé et tout le reste. Ils peuvent pas comprendre de toute façon.

Ma bouche frôle encore sa peau, et je murmure à son oreille. « Si c’était pas du fait que tu pourrais risquer ton job... » Je ne termine pas ma phrase, et l’embrasse à la place. Mon souffle se fait plus court, et je n’entends pas la poignée derrière moi qui tourne. Toutefois, quand la porte s’ouvre brusquement, je me détache en vitesse d’Azalyne, à regret. Je panique un peu, cherchant une excuse même si je ne vois pas quelle excuse je pourrais donner. Une femme relativement âgée que je reconnais comme étant la cheffe du département me regarde sévèrement, puis regarde Aza. J’ai peur de ce qu’elle va dire. [i] Azalyne, téléphone pour toi, c’est apparemment important. »[/color] J’écoute et regarde ce qui se passe, me sentant soudainement très nu dans mon boxer. J’imagine déjà que c’est son petit ami au téléphone, et je me mets à bouillonner à l’intérieur.

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Je regarde sa collègue qui semble sur le point de s’en aller, puis je fixe Azalyne, attendant qu’elle parte elle aussi. Je l’imagine déjà oublier tout ce qui vient de se passer et mentir à son copain. J’ai un peu de sympathie pour lui pendant un instant. J’ai déjà vécu la même situation, au fond. Seulement cette fois ce n’est pas moi la victime.
La jeune femme s’approche et me dit qu’elle va revenir, mais que je peux me rhabiller. Effectivement, ce serait une excellente idée. Peut-être que ça aiderait à ne pas empirer la situation, aussi. Tout doucement, elle m’embrasse, chassant toutes les pensées négatives de mon esprit. Je savoure le bref moment que dure le baiser pourtant innocent, et mon cœur bat la chamade. Puis je la regarde s’éloigner dans le couloir et je constate que je ne comprends plus rien à ce qui se passe. Je me passe une main dans le visage, comme si ce geste pouvait m’éclairer sur tout ce qui vient d’arriver.

Ne trouvant aucune explication logique et rationnelle, j’attrape mon pantalon sur le sol ainsi que ma ceinture, et entreprends de me rhabiller. Je saisis mon t-shirt sur le sol près du banc où il a atterri tout à l’heure, et quelques secondes plus tard, je suis finalement habillé convenablement. Je m’assois sur le lit et regarde les affiches sur la sécurité et l’hygiène sur les murs, histoire de passer le temps. Il n’y a pas grand-chose à faire quand on est coincé dans un cabinet à l’hôpital.
J’entends entrer dans la pièce, et je vois Aza qui sourit. Je me sens fondre tranquillement, elle est tellement jolie quand elle sourit. Ça m’avait manqué. Je souris à mon tour doucement et je ris légèrement en l’entendant m’expliquer qu’il s’agissait de sa mère au téléphone. J’aime mieux ça que son copain, pour être franc. Je descends du lit.

Je regarde la jeune femme qui ramasse ses équipements et les range, on dirait qu’elle se remet à m’éviter tout à coup. J’ai peur qu’elle ait réalisé ses gestes et qu’elle décide finalement de prendre ses distances. Azalyne se passe une main dans les cheveux, et ça me préoccupe. Je veux savoir ce qu’il y a, et en même temps je ne suis pas certain de vouloir le savoir. Elle s’approche de moi et commence à faire mention de tout à l’heure. Avant que sa collègue nous interrompe, alors que je m’apprêtais carrément à coucher avec elle exactement dans cette pièce, sur le lit où j’étais installé il y a à peine quelques minutes. Elle me prend la main, elle n’a jamais terminé sa phrase. Je pense avoir compris.
Je dépose un baiser sur sa main et mon regard croise le sien. Ma gorge se resserre et mon estomac se noue, mais je devais quand même m’y attendre. On n’est pas dans un film, tout de même. Je dépose un doigt sur sa bouche, comme pour lui dire de se taire. « C’est comme si c’était oublié. Je vais garder le secret, et ce sera comme s’il s’était jamais rien passé. » Je lui fais un petit sourire pour la rassurer, je ne veux pas qu’elle se sente coupable à cause de moi.

Je jette un coup d’œil à l’heure sur l’horloge. Aza doit sans doute avoir d’autres patients mis-à-part moi. Je détache ma main de la sienne avec regret, et je regarde la porte avant de plonger à nouveau mon regard dans le sien. Je garde une légère distance avec elle, histoire de ne pas être tenté de me rapprocher d’elle à nouveau. « Je pense que je serais mieux de te laisser bosser. Je crois qu’il y a d’autres personnes qui ont rendez-vous. » J’enfouis mes mains dans mes poches pour lui cacher qu’elles tremblent légèrement. Je suis un peu nerveux, je ne sais pas si c’est la dernière fois que je la vois de ma vie. « Merci Aza. J’aurai au moins eu ça, à défaut de t’avoir toi. » Je laisse tomber mes mots sans réfléchir. Je hausse les épaules, ne sachant pas trop si je dois partir maintenant ou attendre encore.

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Elle explose littéralement et ses mots me surprennent. Azalyne ne veut pas que je parte, au contraire elle veut que je reste avec elle, supposément qu’elle a une question à me poser. Je crains le pire, sans pouvoir expliquer pourquoi. Tout va très rapidement et je ne réagis pas lorsqu’elle saisit ma main pour m’entraîner avec elle dans le corridor. Finalement hors de la salle, Aza lâche ma main mais marche tout de même très près de moi. Je la suis donc en direction de la pouponnière, même si je ne me sens pas trop à ma place là-bas. Elle m’annonce qu’elle en aura pour dix à vingt minutes et je ne peux pas vraiment protester. La jeune femme m’embrasse à la commissure des lèvres et je frissonne. Je ne sais pas comment réagir devant ça. Je la laisse partir et je la regarde se diriger vers un berceau. Je regarde le sol, un peu mal à l’aise.

Je pense un instant aux enfants de ma sœur que je n’ai pas vu très souvent, puis à ma mère qui ne cesse de me harceler pour que je me case et lui fasse des petits-enfants. Je souris à cette pensée. Ce n’est pas près d’arriver, c’est certain.
J’ai aucune idée de combien de minutes se sont écoulées, mais Azalyne revient vers moi et me prend la main. Son regard est rivé au mien, et je ne sais pas du tout quoi faire à ce moment précis. « Aza, tu sais que c’est vraiment mal ce qu’on fait, hein? » Je lui demande pour être certain de ne pas être le seul qui est conscient de ce qui se passe présentement. Mais je ne la laisse pas répondre et je prends son autre main pour l’attirer vers moi.

Je l’embrasse sur le front, me rappelant qu’elle est encore en service, ou en tout cas qu’elle est encore dans sa tenue d’infirmière. Ce n’est pas tout à fait approprié de faire plus que ça pour le moment et je n’ai pas envie de lui créer d’ennuis, alors je me contente de l’entraîner dans mes bras, sans grand effort. « Donc tu m’emmènes où, maintenant? » Je lui murmure la question à l’oreille, puis l’embrasse sur la joue. Mon étreinte est plus protectrice qu’amoureuse, je ne peux pas faire ça en public, ou plutôt je ne peux pas le faire tout simplement. Ce serait abuser de la situation.
C’est ce que je me dis, puis je vois la buanderie. C’est une toute petite pièce, mais personne ne va jamais là, en tout cas pas en plein milieu de journée. Un frisson me traverse à cet instant, et je commence à avoir chaud. Je balaie les idées tordues de ma tête, de toute façon avec cette cicatrice mes activités sont assez limitées. Je baisse la tête, attendant ses instructions.

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Je ne dis rien mais je vois bien qu’elle tente de détourner l’attention du problème. En fait, peut-être que pour elle, il n’y a pas vraiment de problème. Je ne la connais pas tant que ça, sur le plan des relations. Elle a toujours couché à gauche et à droite, étant célibataire. Je chasse cette pensée de mon esprit, il faut que j’arrête de penser à ça, c’est me faire du mal pour rien. Je la serre contre moi et elle fait allusion aux bébés dans la pouponnière. Je fronce les sourcils à sa question, un peu troublé. Je me répète que c’est une simple question, mais je la trouve tout de même curieuse dans de telles circonstances. Je ne sais pas quoi dire en regardant les poupons. En fait, je n’ai jamais vraiment pris la peine de penser qu’éventuellement je pourrais avoir des enfants. Je ne préfère pas en parler à Aza, et l’embrasse donc sur la joue en guise de réponse.

Elle m’annonce que l’on va aller chez elle, et mon cœur palpite pendant un instant. On sera seuls, chez elle. Je sens son bras qui se glisse sous le mien, et je hoche la tête en guise de réponse. Il est vrai qu’une discussion s’impose et que manger ne serait pas de refus.
Je la suis en direction des vestiaires et je me demande pendant un instant si elle ne m’a pas menti, puis je comprends qu’elle veut simplement éviter qu’on me voie. Je souris, un peu amusé de jouer à cache-cache pendant que la jeune femme se change. Je me demande ce que ses collègues diraient si elles me trouvaient ici.

Je n’ai pas la (mal)chance de le savoir, puisqu’Azalyne ressort rapidement de son coin, vêtue de vêtements plus normaux que sa tenue d’infirmière. Je la préfère comme ça, et je souris bêtement en la voyant arriver. Le chemin du retour est bref et plutôt silencieux. Ce n’est qu’en arrivant chez elle qu’Aza brise le silence, me demandant si je veux boire quelque chose. Je pense quelques secondes avant de lui répondre. Mon regard croise le sien. « Je vais prendre un verre d’eau, s’il te plaît. » Je ne me sens plus comme chez moi, ici. Enfin, ce n’est plus comme avant. Il y a quand même un sacré moment que je ne suis pas venu chez elle. Après avoir pris soin de retirer mes chaussures, je me promène comme si c’était ma première visite. « Ça fait un bail. » Je regarde en direction de la chambre d’ami. J’y ai dormi presque une centaine de fois, j’en suis persuadé. Je baisse la tête, ne sachant pas quoi dire. Tout est différent, maintenant.

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J’entre dans la chambre d’amis, simplement pour voir si tout est encore à la même place. Je n’entends pas Azalyne arriver vers moi, et je frissonne en sentant sa main sur mes côtes. Mes yeux se ferment par réflexe. Pourquoi est-ce qu’elle fait ça? Je croise son regard, elle me sourit en tendant le verre d’eau. Je prends une gorgée, histoire de garder le silence un peu plus longtemps. J’ai peur d’entendre ce qu’elle pourra me dire, et lorsqu’elle brise le silence je crains le pire. Petit à petit, alors qu’elle parle, je vois bien qu’elle est mal à l’aise, ou du moins elle cherche visiblement ses mots. Elle est maintenant face à moi, et je ne comprends pas tout à fait ce qu’elle essaie de me dire. Elle me raconte qu’elle a ressenti quelque chose venant de moi, mais ne termine pas sa phrase. Je cherche moi-même quoi lui dire. Je n’ai aucune excuse pour ma défense. Elle sait tout maintenant, je ne peux plus rien nier.

Tout se passe tellement vite, et je ne résiste pas en sentant ses lèvres sur les miennes. Je me rapproche d’elle, comme elle semble le désirer tant, et sans y penser je laisse tomber le verre sur le tapis. Je paierai pour le nettoyage, je m’en fous. Je l’embrasse de plus belle, et mes mains se posent sur ses hanches. J’ai chaud mais je frissonne. « Je t’aime tellement, Aza. » Je souffle mes mots contre sa bouche et avec beaucoup d’hésitation, mes doigts glissent sous son haut et longent son ventre. Pendant cet instant, j’ai l’envie égoïste de l’attirer sur le lit avec moi. Je veux beaucoup plus, et je me fiche bien qu’il y ait quelqu’un d’autre. Je me laisse tomber sur le matelas et mes mains se posent sur les cuisses de la brunette. Je l’attire sur moi sans trop de difficulté. Je ne réfléchis pas à mes gestes et cherche mon souffle, embrassant Azalyne de plus belle.

En temps normal, ma conscience me gueulerait d’arrêter, qu’elle a un copain et que je devrais peut-être me mettre à sa place. Je cesserais tout et me confondrais en excuses, puis trouverais une raison pour m’éclipser. Seulement ma raison semble s’être mise en veilleuse puisque sans plus d’hésitation, j’entreprends de retirer son haut. Je ne détache pas son soutien-gorge, et balade mes mains sur sa peau, comme fasciné. Le moment est surréaliste. Je l’embrasse à nouveau, comme pour rattraper le temps perdu. Mes mains se posent sur ses fesses. J’hésite à aller plus loin à présent, même si j’ai terriblement envie d’elle. Je la regarde dans les yeux et l’embrasse à la commissure des lèvres. « On devrait pas faire ça. » Mes mains se détachent d’elle et je constate ce que je m’apprêtais à faire.

Je m’allonge sur le dos, poussant un long soupir en sentant la douleur me tenailler légèrement au niveau de ma cicatrice. Pas de gestes trop ‘physiques’ jusqu’à nouvel ordre, qu’ils ont dit. Je me maudis de ne pas être capable de me contrôler un peu plus et je regarde Aza. Je me sens coupable, mais en même temps je me demande si elle ne fait pas ça que pour s’amuser. Je ferme les yeux quelques secondes, hésitant à les ouvrir. Je finis par les ouvrir, et je plante mon regard dans celui d’Azalyne. Je suis soudainement très sérieux. « Tu comptes le quitter? » Je me doute de sa réponse. Elle ne sait pas exactement ses sentiments, elle doit réfléchir, tout un tas de raisons qui voudront dire non. Je continue de la fixer, attendant le verdict.

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Je constate à sa réaction qu’elle ne s’attendait pas à une telle question. Azalyne avait probablement en tête que tout serait oublié et qu’on ne ferait pas une grosse histoire de ce qui aurait pu se passer. Je la regarde s’installer sur le lit en silence, et alors qu’elle prend ma main, je sens ses doigts tracer mon bras qui cicatrise un peu plus lentement que le reste. Je frissonne au contact, et mon regard évite soudainement le sien alors qu’elle commence à parler, hésitante. Je m’attendais à sa réponse, et l’entendre me dire que si j’avais tenté ma chance plus tôt, les choses seraient différentes, je me sens idiot, car je me suis répété la même chose des centaines de fois.

Elle ne me regarde plus mais continue de parler. J’écoute attentivement ce qu’elle me dit, même si je trouve particulièrement douloureux de l’entendre me dire que j’ai bien fait de m’arrêter. Je sais que c’était la bonne chose à faire, mais l’entendre le mentionner est pénible. Puis Azalyne m’annonce qu’elle n’est pas amoureuse de Seth. Je fronce les sourcils et la regarde. Je ne comprends plus rien à ce moment précis. Elle est en couple avec un gars qu’elle n’aime pas? Et lui, il le sait? Et s’il était méchant avec elle, au fond? Je regarde la peau de la jeune femme à la recherche d’un bleu qui pourrait confirmer mes suppositions mais laisse tomber l’affaire. Je réfléchis quelques secondes à sa question, puis approche mon visage du sien. « Ça fait un an que j’attends. Je devrais survivre. » Je l’embrasse doucement et frissonne alors que je me redresse lentement sur le lit. J’avais pas pensé à ce détail, mais mes médicaments sont chez moi. Mon bras commence à être douloureux, mais je préfère ne rien dire. Je soupire et dépose un baiser sur le front d’Aza.

« De toute façon, tu sais que je peux pas te dire non. » Je lui souris, un peu amusé et la serre dans mes bras. Je constate qu’elle n’a pas remis son haut et ça me rend un peu inconfortable maintenant que mes esprits sont revenus. J’attrape mon t-shirt sur le lit pour le lui donner. Je réalise que je ne suis pas très vêtu de mon côté non plus, et entreprends de remettre mon pantalon, puis me lève finalement. Je sens quelque chose d’humide sous mon pied, puis constate le verre vide sur le tapis. « C’est moi, ou j’échappe toujours un truc quand je viens ici? » Je regarde en direction de la porte, espérant sortir de la chambre rapidement. J’ai pas envie de jouer à ça ce soir, et en plus je commence à avoir faim. « Tu nous prépares quoi pour le repas? » Je regarde Azalyne un peu timidement. Je ne suis pas certain de l’attitude à adopter avec elle, maintenant.

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Tout se passe rapidement, elle me lance que je suis un peu maladroit et s’éclipse de la chambre sans un mot de plus. Je reste assis, un peu perturbé. Je fixe le tapis humide, puis observe la pièce en détails. J’ai l’impression que tout ça n’est pas réel, et que je suis sans doute en train de délirer à cause des médicaments. Pourtant j’entends Azalyne qui prépare quelque chose dans la cuisine, ce qui me confirme que je ne suis pas fou. Je me lève, un peu hésitant, et au travers de la porte je regarde la jeune femme qui s’affaire dans la cuisine. Je repense à ce qu’elle m’a dit il y a quelques minutes à peine. Il ne faut pas lui forcer la main, d’accord, mais ça veut dire quoi exactement? J’hésite à lui poser la question, je ne veux pas la rendre mal à l’aise plus qu’elle ne doit déjà l’être. Je me sens à nouveau honteux de lui avoir caché tout ce temps mes véritables sentiments à son égard. J’hésite à sortir de la chambre, ne sachant pas quoi lui dire. Je rassemble finalement mon courage et m’avance en direction de la cuisine. Je remarque Azalyne qui a les larmes aux yeux mais je comprends rapidement qu’il s’agit des oignons qu’elle coupe et non d’une tristesse quelconque.

« Est-ce que je peux t’aider? » Je souris doucement, essayant de paraître le plus normal possible. Je me rappelle le verre dans la chambre d’amis, et avant qu’elle ait pu me répondre, je disparais pour aller le chercher. Une façon de m’éclipser à nouveau? Un peu. À vrai dire je me sens idiot devant elle, alors qu’elle sait tout ou presque à présent. Je soupire, ramasse le verre toujours intact et l’emmène dans la cuisine. Quelques secondes de répit seulement, mais c’est déjà au moins ça. Je n’ai aucune idée de quoi lui dire à présent. Je dépose le verre vide sur le comptoir, et évite le regard de la jeune femme. « Je vais avoir besoin d’une ou deux serviettes, pour la chambre… » Je ne sais pas pourquoi je le lui dis, en temps normal j’aurais tout simplement pris les serviettes et aurait commencé le nettoyage. Je me sens complètement idiot, et surtout j’ai l’impression de ne plus être à ma place ici. Du moins pas avant qu’elle ait pris certaines décisions. Je regarde la viande qui cuit, évitant toujours de regarder Aza. « Ça sent bon en tout cas. » Je frôle son bras par mégarde, et recule. Je regarde en direction de la salle de bain. « Bon, je vais aller nettoyer un peu mes bêtises… » Je m’éclipse pour aller nettoyer la chambre et me questionne sérieusement sur la façon dont je vais survivre à ce repas.

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everything is so wrong now.

J’éponge machinalement le sol, réfléchissant à la suite. Je m’imagine passer un repas silencieux et tendu en compagnie d’Azalyne. Je dramatise pas mal la situation, mais en ce moment tout semble aller terriblement vite et je n’aime pas ça du tout. Je change de serviette, et au moment où je pose le tissu sur le sol, j’entends la jeune femme qui crie des jurons dans la cuisine. Elle ne semble pas aller trop bien, d’après le ton de sa voix. Je laisse le temps s’écouler un peu, et je l’entends bientôt ouvrir le robinet. Elle s’est probablement blessé. J’hésite un instant à aller voir, puis je me dirige le plus normalement possible vers la cuisine. J’essaie de ne pas paniquer en voyant tout le sang sur le sol, et je suis en quelque sorte rassuré de la voir rincer une simple entaille dans l’évier. Je m’attendais à un doigt coupé, ou un truc du genre.

« Je vais aller chercher des pansements. Je reviens. » Je me précipite dans la salle de bain comme s’il s’agissait d’une blessure mortelle, et je me mets à parcourir les armoires à la recherche d’une trousse de premiers soins. Je trouve finalement ce que je cherche et reviens en vitesse vers la cuisine pour retrouver Azalyne qui se tient toujours devant le lavabo. Je m’approche d’elle, déposant la petite malette sur le comptoir et prends la main de la jeune femme pour inspecter la plaie. « Eh bien, je pense que je vais couper les légumes maintenant. C’est pas très joli tout ça. » Je sors de quoi préparer un pansement à Azalyne, et je trouve plutôt drôle d’être celui qui fait son bandage. Je dépose un baiser sur son doigt et la regarde en souriant.

« Si tu veux, je vais m’occuper du reste. Tu as qu’à t’asseoir et me regarder faire, ok? » Je garde une légère distance entre elle et moi, histoire de ne pas encore créer d’histoires. Je préfère ne plus en parler, mais je ne peux pas oublier ce qu’elle m’a dit tout à l’heure. « Tu devrais relaxer, boire ton verre tranquillement. » Je croise son regard et mon cœur se serre dans ma poitrine. Je ne sais pas trop comment elle me perçoit, maintenant. Elle me prend peut-être pour un fou si ça se trouve. « Laisse-moi faire, je m’occupe de tout, d’accord? » J’ai envie de la serrer dans mes bras, mais je suis sans doute seulement trop émotif. Je me contente donc de lui sourire tendrement, lui montrant la table pour l’inciter à aller s’asseoir.

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